TUNISIE 1972

08 UNE PEPITE DE SEL DU CHOTT EL DJERID

Une pépite de sel du Chott El Djerid


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GENERALITES

Superficie : 163 610 km² (France : 552 000 km²), 30% du territoire sont occupés par le Sahara ; le reste de cette terre est composé de régions montagneuses et de plaines fertiles

Population : 5,3 millions ; France : 52,78 millions (1972)

Berceau de la civilisation carthaginoise ; elle connaît son apogée au III° siècle avant J.C.

Indépendance : 20 mars 1956

Economie : agriculture et extraction minérale ; lors de l’indépendance, la Tunisie est le pays le moins industrialisé du Maghreb

Monnaie : dinar tunisien

 

LEXIQUE

bir : puits

bordj : fort

bourra : alcool de figue

dar : village

foutah : vêtement traditionnel en coton tissé

gerba : peau de chèvre, outre

hammam : bain de vapeur chaude pour les soins corporels

kasba : forteresse

medina : ville, ville ancienne

 

 

Automne 1972

A Djerba, immersion au sein d’une autre culture, un conférencier émérite initie les profanes à l’Islam et à l’architecture arabe.

NOTES

ISLAM

En 1972, l’Islam compte 600 millions de fidèles, ce qui en fait la deuxième religion du monde, après le christianisme. Le nombre de ses adeptes est en augmentation. Ses frontières n’épousent pas celles du monde arabe : les Arabes musulmans sont minoritaires, les Asiatiques, majoritaires. L’Islam rassemble des peuples de races et de langues différentes, qui ont connu des destins historiques divers. Une attitude commune face à la divinité les unit. L’Islam est une religion, mais ce fut également une civilisation et une culture. Aujourd’hui, c’est essentiellement une religion.

A l’origine était Mohamed, que les Occidentaux, parfois, nomment Mahomet. Il vécut de 580 à 632. C’est une apparition de l’archange Gabriel qui lui annonce l’appel de la divinité. Il prêche au sein d’un pays désolé, auprès d’un peuple pauvre, les Bédouins, méprisés par les sédentaires qui n’apprécient guère les nomades. Le désert a marqué l’Islam. Son message, consigné dans le Coran, fait trembler sur leurs bases les anciens empires romain et byzantin, ainsi que la chrétienté. Il est révélé en langue arabe, qui de ce fait est  sacrée et jouit d’un profond respect. C’est un code religieux et social, doté d’un caractère juridique. N’évoque-t-on pas la loi coranique ? Voilà qui permet de comprendre l’importance de la profession de foi, témoignage extrait d’un verset coranique. Certains prénoms font référence à Dieu : Abdel, esclave, mais esclave de Dieu, Fouad, cœur, mais cœur de Dieu, etc. L’Islam est soumission à la divinité. Le pécheur est un réprouvé.

LE DOGME

-1) l’unicité de Dieu, être éternel, transcendant et omnipotent, comme l’affirme l’une des sourates du Coran. La sourate est un ensemble de versets. Dieu a créé le monde en sept jours. Il y a sept cieux et sept terres. Il a créé les anges, qui sont dépourvus de sexe, et quatre archanges. L’homme dispose de deux anges gardiens. Un ange est déchu, c’est Iblis.

La faute d’Adam ne retombe pas sur sa postérité : le péché originel n’existe pas, l’Homme n’est pas déchu. Ainsi, cette réaction assez orientale du Prophète supprime-t-elle l’angoisse.

-2) la mission des prophètes. Dieu a chargé des hommes de faire connaître sa volonté : la révélation coranique a été préparée par Abraham, Moïse et Jésus (qui, en l’occurrence, n’est pas fils de Dieu)… Le plus important des prophètes demeure Mohamed, qui a mis le point final à la révélation. Pour les Musulmans, la pensée de la divinité a été déformée par les Juifs et les Chrétiens.

-3) le jugement dernier (et la résurrection) : l’avènement du Madi sera l’ultime démarche pour sauver les hommes. Le faux messie apparaîtra, sera combattu et disparaîtra.

Le Coran, le livre de la révélation, ne recèle ni mystères ni paraboles.

PREDESTINATION ET LIBRE ARBITRE

La prédestination telle que la concevaient les Jansénistes ou telle que la décrivent Luthériens et Calvinistes est à l’exact opposé de celle qui gouverne l’âme des Musulmans. Ceux-ci  ne craignent pas Dieu ; ils s’en remettent à lui. Voilà qui efface l’angoisse.  L’homme est créé à l’image de Dieu, et    « une lumière faible n’est pas autre chose que de la lumière ». Bien entendu, la prédestination est contraire à l’idée de liberté : mektoub, (maalesh au Moyen –Orient), c’est écrit ! Le « si » en occident, c’est l’anti-histoire. Il vaut mieux dire mektoub !

LES CINQ PILIERS DE L’ISLAM

-1 la profession de foi,

-2 la prière (adoration), précédée d’un rite de purification,

-3 le ramadan (jeûne), c’est  l’occasion de la reprise en main de la communauté, même des non-pratiquants (prêches) et une manifestation de l’égalité : tout le monde jeûne.

-4 la zakat (aumône), don de 10 à 20% de ses gains aux pauvres : c’est soit un impôt coranique soit un don en moutons.

-5 le pèlerinage à La Mecque, un village peut déléguer l’un de ses habitants pour accomplir le pèlerinage: il représentera l’ensemble du village. La tunique de couleur blanche est de rigueur.

 

ARCHITECTURE

Un peu d’Histoire : en 634, les armées arabes déferlent en Perse, en Egypte et en Palestine. Au X° siècle la dynastie des Fatimides exerce le pouvoir en Egypte (969-1171) ; et à partir du XI°, les Berbères au Maroc (dynastie Almoravide 1049-1147 ; dynastie Almohade 1147-1269 ; dynastie des Mérinides 1249-1465). « Les empires médiévaux du Maroc furent avant tout des empires africains, notamment forgés par des dynasties berbères qui ont jeté les bases du pouvoir royal au Maroc, à la charnière entre l’Espagne de la Reconquista et les grands empires continentaux africains », écrira plus tard Jean-Pierre Bat (Libération, 28/11/14).  Du XIII° au XVI° siècle, les Mamelouks sont en Egypte. Constantinople est conquise en 1453….. Les Seldjoukides, dynastie turque fondée en 1037, règnent en Perse et en Anatolie. Les Ottomans, en Turquie…  Le nouvel empire « à cheval sur l’Occident chrétien et l’Orient à majorité musulmane sunnite » connaît, au XVI° siècle un bref apogée (Soliman, dit le Magnifique 1520-1566). Au terme d’une lente décomposition, il disparaîtra à l‘issue de la première guerre mondiale.

MEDINA

La ville arabe (medina), dont rues, ruelles et venelles dessinent un labyrinthe, se construit à partir de la mosquée. Les constructions usent de l’arc brisé et outrepassé.

Les Sunnites, tenants de l’Islam officiel, sont hostiles à la représentation figurative ; les Chiites, « schismatiques »,  les Perses en particulier, y sont favorables. Ainsi, l’ornementation extérieure y emprunte des motifs floraux, épigraphiques, géométriques ou bien recourt à des arabesques.

A Djerba, les mosquées, édifiées par des paysans, obéissent à des règles de sobriété et de pureté.

La mosquée est un lieu consacré à la prière et à l’enseignement, dont le calme est propice à la méditation : on fait le vide en soi … La medersa prodigue l’enseignement.

A l’origine, l’Islam naît chez les Bédouins, qui vivent sous des tentes. Lors de la conquête arabe, aux VII° et VIII° siècles, il a su conserver l’héritage du passé, s’adapter aux lieux et à l’architecture locale. Ainsi, en Tunisie, l’influence de l’arc romain dans l’architecture est notable. Pour soutenir l’arc, on dispose d’une grande variété de chapiteaux. En Turquie, où règne un climat plus froid, la plupart des mosquées ne disposent pas de cour extérieure… L’art musulman est un art  du Moyen Age qui s’achève totalement au XVIII° siècle.

 

 

VISITE DE L’ILE DE DJERBA

C’est une île dépourvue de relief : le paysage est plat, la côte basse. Houmt Souk, la capitale, compte peu d’habitations ; c’est une ville de marché, dotée d’une criée où les mareyeurs achètent le poisson que les marins ont capturé ; ils pêchent aussi des éponges. Sur la mer, voguent des voiles latines. Les potiers fabriquent des amphores. La tradition romaine demeure également dans le drapé de certains vêtements. On confectionne des couvertures à la manière traditionnelle ainsi que des tapis à la Délégation de l’ « Office national de l’artisanat ». En ce lieu, des jeunes apprennent un métier. Certains professionnels cisèlent des bijoux d’argent, parfois enrichis d’émaux. On y travaille aussi les peaux.

A l’entrée de la cité, on s’attarde au musée. La porte centrale et une autre, ornementée, ainsi que des coupoles, dont une en tuiles vernissées, attirent le regard.

Un dicton populaire dit la modicité des revenus des habitants de l’île : « le premier jour, tu manges la peau de la datte, le second, sa pulpe, et le troisième, tu suces le noyau… » Le port accueille un déjeuner qui dément un tel dicton : salade tunisienne, brick- fine crêpe de semoule- à l’œuf et au thon, couscous au mérou et makrout, un délicieux gâteau de semoule et de miel…

CAMPAGNE

La maison fortifiée ( menzel) caractérise l’architecture de l’île.  Elle offre une protection : on y abrite famille, amis, récoltes et semences. Elle tisse un jeu de lignes : rectangles, coupoles, voûtes…

La moindre parcelle de terre est cultivée. Orge, olivier… Le palmier offre également l’une des  ressources importantes. C’est un palmier dattier, dépourvu de noix de coco. Chaque arbre produit de trente à trois cents kilogrammes de dattes. Par ailleurs, on saigne son tronc pour recueillir sa sève (lacmi ou lakshmi) dans une cruche, on tresse ses palmes, et son tronc est débité en poutres.

Non loin de Gallala, ce village de potiers qui façonnent l’argile et cuisent leurs œuvres dans des fours collectifs, au cœur d’une palmeraie, se développe une expérience de culture et d’irrigation : sous les palmiers,  une culture d’asperges dessine des sillons sinusoïdaux ; ils composent au bord de la mer, une bande de couleur verte, qui succède à une sorte de steppe.

La campagne est semée de puits ainsi que de citernes pour recueillir l’eau de pluie ; elle est traversée de fins canaux d’irrigation : à Djerba, l’eau est salée et l’île est abreuvée par un pipeline qui naît sur le continent … L’île manque également de bois.

SYNAGOGUE

Depuis 2500 ans, à l’époque du règne de Nabuchodonosor, une communauté juive demeure sur l’île. La Guerre des six jours a convaincu beaucoup de ses membres de quitter Djerba pour Israël. Il reste environ deux mille âmes et deux villages juifs dont les habitants s’habillent comme les Arabes, sans  que les vêtements les distinguent de leurs compatriotes. Ils sont, pour la plupart, commerçants ou bijoutiers. Ils se réunissent pour la célébration du culte à la synagogue El Ghriba. Elle accueille, chaque année, au mois de mai, nombre de pèlerins. Elle serait l’une des plus anciennes du monde : elle aurait été construite au V° siècle avant Jésus Christ «  par des juifs fuyant la destruction du temple de Salomon ». Elle recèle une Thora (texte de la Loi juive) du XII° siècle, propose l’enseignement d’une école talmudique et une hostellerie pour les pèlerins.

On prend le chemin du retour et on admire Meninx, un ancien port romain, El Kantara (la carrière)… En face, on voit le continent. Non loin de là, moutonnent des dunes de sable ; on prévoit d’y édifier un hôtel de 2500 lits ! Le tourisme de masse tue le tourisme.

 

INSTANTANÉS

A proximité du café du village, des gosses, beaux comme de jeunes dieux, jouent à la guerre. Sur l’aire de battage, paresse un dromadaire. Des parcelles de terre dessinent des figures géométriques en forme de carrés. Au bord de la mer, des femmes lavent la laine ; elles portent des vêtements traditionnels. Une autre femme marche en tenant une cruche sur sa tête. De modestes  mosquées pointent leur minaret vers le ciel. Il en existe environ trois cents et…deux églises ! Sous le soleil, des champs d’oliviers s’étendent jusqu’à l’horizon. Des troupeaux de chèvres et de brebis paissent. Là-bas, des cavaliers s’exercent à la fantasia, cette charge de guerriers  d’autrefois qui, aujourd’hui, appartient au patrimoine et enthousiasme les visiteurs…

 

DÉSERT

En route pour le désert avec un véhicule approprié et un chauffeur local. Les chameaux boudent la Tunisie ; en revanche, les dromadaires s’y plaisent. Ils gambadent dans le désert et sont confiés à des bédouins pour la reproduction. Ces animaux s’abreuvent à un puits où ils prennent l’habitude de revenir : l’instinct les guide ?

Les bédouins conduisent les caravanes à travers le désert. Le Chott El Djerid est un lac salé qui s’étend dix-huit mètres au-dessus du niveau de la mer. Quatre mois sont nécessaires aux bédouins pour en faire le tour et trois jours pour le traverser. Leur notion du temps est différente de la nôtre. Portant une cruche, ils marchent à pas lents, les pieds tournés vers l’extérieur. Conscient de la valeur des choses et de l’effort que requiert leur acquisition, ils savent combien de journées de marche postule l’approvisionnement en eau. Le bédouin ne mange qu’une fois par jour, aux alentours de seize heures ; il consomme de la viande, des légumes et du pain. Il vit en harmonie avec la nature.

Au loin, là-bas, défile une caravane… C’est un mirage ! L’air chaud se décompose en plusieurs couches et produit un effet miroir, voire agit comme une loupe.

TOZEUR

C’est une splendide palmeraie irriguée par de nombreuses sources. On se promène à pied, à l’ombre des palmiers, accompagné par l’eau. La cité compte 15000 habitants, dispose d’un lycée moderne, comme beaucoup de villes tunisiennes, et cultive une poire renommée. Un écrivain public permet aux illettrés d’écrire.

Au zoo de Tozeur, on découvre varans (famille des sauriens), scorpions jaune, dont la piqure n’est pas mortelle, et noir, plus petit, rapide et mortel, vipère à corne et sous-marin des sables… A la porte du zoo, une jeune et jolie bédouine suscite l’admiration des visiteurs.

On regagne la route, à travers une espèce de steppe où poussent des touffes rares et rases dans une terre grise. Des dromadaires y vagabondent. Ici, quelques bédouins se protègent du soleil sous une tente, là, un misérable gourbi. Chèvres et moutons paissent.

NEFTA

La vieille ville, coiffée de nombreuses coupoles, dessine un labyrinthe de rues dont le sol est fait de sable, un caniveau en leur milieu ; elles sont bordées de petites maisons. La cité domine la palmeraie où coulent des sources d’eau vive. Assis par terre, des hommes devisent, des femmes vaquent à leurs occupations telles que la quête de l’eau. De nombreux enfants jouent à la sortie de l’école. La scolarisation est très poussée, peut-être trop, ce qui pose le problème de l’emploi des diplômés.

Le sous-sol du Sahara tunisien recèle une nappe d’eau à 1500 mètres de profondeur. On prétend que l’ONU serait hostile à son exploitation, dont les conséquences menaceraient la Suède et l’Union soviétique…

Le soir, le ciel offre une carte parfaite de la voie lactée. Dans la palmeraie, autour d’un feu de palmes sèches, on assiste à un spectacle de chants et danses de Nefta. Un premier chant est une sorte de complainte, l’histoire d’une fille dont la beauté ne facilite guère sa quête d’un fiancé. Suivent des danses guerrières ; ces danses du sabre expriment la virilité, comme l’atteste la position de l’arme tenue droite ; un, deux, puis quatre hommes offrent leur danse. Les danses du fusil leur succèdent ; elles sont exécutées, lors des mariages,  pour disperser les esprits, trace d’animisme comme il en existe ailleurs dans ce pays. Enfin, une danse dite « noire » clôt la soirée: c’est un dialogue avec la divinité sur un rythme africain. Les pas en sont complexes. Les castagnettes rappellent la chaîne des esclaves. Les autres percussions sont des amphores, recouvertes d’une peau à l’une de ses extrémités et ouverte à l’autre. Retour à pied sous les étoiles.

 

DJERBA-TUNIS

La veille du départ, prévu à six heures, on dort à Houmt Souk, hôtel Dar Faiza ; La nuit est courte. Dès le départ, je constate que je suis le seul Français dans le car. Les femmes portent foutah et les hommes djellaba ou blouse. Sauf, les jeunes qui font exception à la tradition. Certains écoutent de petits transistors. Trois ou quatre enfants s’ennuient et l’un d’entre eux, un bébé, pleure. Le véhicule est sale ; les passagers crachent par terre… A 10 heures, nous arrivons à Gabès, centre important, qui, cependant, a conservé son charme.

Au terme de l’escale, nous reprenons notre chemin ; à 67 kilomètres de la ville, la route est coupée par une inondation. Attente, passivité générale et retour à Gabès. On revient sur les lieux, nouvelle attente, et enfin, retour à Gabès pour la nuit. Une femme pleure : elle est seule… C’est ramadan et donc, comme tout le monde, je m’abstiens de fumer.

Nous logeons dans un okalet, un gîte d’étape. Le repas se résume à un plat de  spaghetti. Nous sommes cinq par chambre. Discussion avec deux jeunes Tunisiens, qui aiment la France, disent-ils. L’un y a fait un stage, est favorable à Bourguiba, le président en exercice, mais se plaint du manque de liberté ; l’autre, prudent, estime que l’on ne doit pas donner des informations politiques à un étranger.

Autour d’un brasero, on déguste thé vert et thé noir et les chansons en arabe bercent nos cœurs… A côté de nous, deux vieux Arabes jouent aux cartes et, parfois, s’adonnent à la contestation… Nous buvons de l’eau contenue dans une cruche de Gellala ou bien de Nabeul…

Nous disposons d’un WC et d’un lavabo ; l’hébergement est spartiate. Le lever est prévu à 6 heures et le départ, à 7 heures, mais en fait, différé à 8heures 30, à la suite d’une altercation du chauffeur avec le chef régional. Je suis à jeun et le demeure, ce qui m’indispose. On longe la mer,  de Gabès à Sfax, et de Sfax à Tunis : c’est un paysage sans relief, planté d’oliviers, qui s’alignent sur des kilomètres et des kilomètres, entourés d’eucalyptus.

A Sfax, on admire les beaux remparts de la medina. On remarque le centre de planning familial et un vaste et beau lycée de garçons. Les rues de la ville sont inondées. Et, ici aussi, prospèrent les oliviers.

A Sousse également, les remparts de la medina suscitent l’admiration…

TUNIS

Sur la route de la capitale, qui s’étire sur une voie, croissent des vignes, ainsi que quelques figuiers et grenadiers. Un dromadaire traîne la charrue et laboure la terre. Des nomades vivent dans des gourbis. Des quartiers pauvres gangrènent l’entrée de la capitale. Hamed, rencontré pendant le voyage, me guide jusqu’à l’avenue Bourguiba, où je descends à l’hôtel Carlton. Le Coq d’Or m’accueille le temps des repas.

Originaire de Djerba, Hamed me présente Mohamed, 19 ans, étudiant en première année de lettres classiques arabes. Il vient du sud du pays et travaille depuis l’âge de douze ans ; aujourd’hui, chez un bijoutier. Passionné et idéaliste, il connaît l’Histoire arabe et celle de la Tunisie. Il EST, dit-il, arabe, africain et tunisien. Il est partisan de la reconnaissance d’une nation arabe, fondée sur la communauté de langue et de religion et une intégration économique reposant sur un même système économique.

Le premier stade serait la constitution d’une communauté du Maghreb (Maroc, Algérie, Tunisie, Mauritanie, Soudan) et, ensuite, une entité plus vaste, sans le Liban, qui n’est pas musulman. Il admire Khadafi et n’apprécie guère le roi du Maroc. Il se dit nationaliste, admire Nasser, le premier dirigeant qui ait osé dire que tout devait venir des pays arabes. Favorable au système des coopératives, il est hostile à la censure de l’information et prône la suppression de la polygamie que ne stipule pas le Coran l Les jeunes, affirme-t-il, prendront le pouvoir. Il admire le passé de Bourguiba, mais regrette qu’il soit soutenu par un régime autoritaire. Le Cap Bon, c’est la main de la Tunisie tendue à l’Europe…

CARTHAGE

On se promène en calèche dans Carthage, la cité punique, romaine et byzantine : musée et thermes d’Antonin, amphithéâtre, cimetières des différentes époques, les deux ports puniques, tophet de Salammbô, l’aire sacrée dédiée aux divinités phéniciennes de Tanit et Baal Hamon. Les noms des rues de Carthage évoquent Hannibal, Tanit, Didon, Baal Hamon, Plutarque… Un riche passé !

L’Histoire de la ville est une sorte de labyrinthe, à l’instar des villes arabes, qui seraient comme une métaphore des méandres complexe de son histoire : comme tout comptoir phénicien, Carthage verse un tribut à Tyr. Mais le déclin de cette dernière incite la cité punique à affirmer son indépendance, au cours de a seconde moitié du VII° siècle A.C. ;  Rome est sa rivale. Au terme d’un cycle de trois Guerres puniques, les Romains, vainqueurs, détruisent Carthage en 146 A.C. (Carthago delenda est, Caton l’Ancien) et reconstruisent la ville. Réduite à une province de l’empire romain, elle ne retrouvera guère le statut précédant sa défaite.

On admire la résidence du président Bourguiba et le quartier résidentiel composé de belles villas fleuries … Sidi Bou SaÏd est un exemple de style arabe. Le panorama de la baie de Tunis comble le regard.

MEDINA

La medina de Tunis, la ville ancienne, est pittoresque. On déambule à travers les souks, entre autres, le souk des tailleurs, on visite le Palais du Bey, et l’on admire diverses mosquées… La dénomination de la rue des Avocats surprend le visiteur.

De retour à Djerba, le séjour se poursuit d’excursion en excursion… On visite Mahboubine, le village « bien aimé », situé à cheval sur l’axe routier reliant Midoun à El May, au cœur de l’île, composé de menzels et de la mosquée El Kateb, édifiée au début du siècle. On admirera aussi la mosquée d’El May, bourg situé à neuf kilomètres de Houmt Souk. Enfin, un bac transportera le visiteur jusqu’au petit port d’Adjun. Ainsi s’achève la visite de ce pays dont le peuple est accueillant, chaleureux et entreprenant.