CROATIE, VOIX

JUILLET 2008

 

Mardi 22 juillet

SPLIT

La circulation est dense. Il faut plus d’une heure au minibus pour parcourir la trentaine de kilomètres qui sépare l’aéroport de la ville ancienne. La végétation méditerranéenne -palmiers, lauriers –roses, bougainvillées, vignes et oliviers- ne masque pas les banlieues bétonnées. Le bus s’arrête entre la mer et le palais de l’empereur romain Dioclétien (245-313), absent depuis des siècles. Il fait chaud en ce début d’après – midi et, l’on peine à se frayer un chemin à travers la foule cosmopolite : elle déambule lentement le long des allées marchandes qui ont envahi les abords du palais.

LE BRIC–A-BRAC DE DIOCLETIEN

Après installation à l’hôtel, à mon tour, je vagabonde sans but précis dans les rues avoisinantes où s’écoule le flot des touristes. Inscrites à l’intérieur de l’enceinte de l’ancien palais de Dioclétien, elles sont dallées de marbre. Les rues, les moindres ruelles, les places et placettes et même, les loggias, tout témoigne de l’influence de l’architecture italo-vénitienne. Du linge, tendu aux fenêtres, sèche au soleil. Ici et là, dégringolent des grappes profuses de bougainvillées. Un peu partout, terrasses et petits cafés s’offrent au chaland ; pizzerias et glaciers abondent. On songe à l’Italie. Se perdre au fil de cet écheveau de ruelles bordées de belles constructions en pierre est un plaisir ! À l’ombre d’une colonne antique, un garçonnet, ballon dégonflé au pied, tente d’interrompre le flux des visiteurs pour, enfin, tirer au but : « please, please », supplie-t-il !

La vaste enceinte du palais, 215 mètres sur 180, si l’on en croit les autochtones, compose un ensemble fait de bric et de broc : les styles architecturaux s’échelonnent de l’antiquité à nos jours. L’hôtel où je demeure est lui-même édifié à proximité du péristyle de l’ancien palais et des colonnes ornées de chapiteaux de l’ordre corinthien. À l’extérieur, les marchands créent un autre bric – à- brac dont l’inventaire ne saurait être exhaustif : chaussures, sandales et tongs, pantalons et shorts, chemises et tee –shorts, passementerie, chapeaux et coiffures divers, peintures, objets d’artisanat variés, bouquets de lavande… On vend tout ! Tout ce qui est susceptible de satisfaire cette armée de touristes, modernes légionnaires de l’invasion.

Du quai que regarde l’enceinte maritime du palais, on observe les ferries amarrés, ces merveilleux bateaux qui vont sur l’eau et emportent les visiteurs vers les îles. Celles-ci, sommets de montagnes ennoyées, festonnent, tel un galon de broderies la côte dalmate.

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CAFES ET CHUCHOTEMENTS

Le long de la Riva, la rive qui borde la mer, semée de bancs blancs, s’étalent les terrasses, à l’abri de toiles blanche, tendues comme des voiles qui faseyent sous le vent et protègent du soleil les consommateurs… On y déguste du thé (ici, on le dit « indien ») en contemplant la mer et les îles qui s’allongent au large telles des femmes lascives. Et soudain, le souffle du vent inflige le remugle des eaux du port et voilà le charme rompu.

Varos, le quartier des marins recèle quelques authentiques restaurants : le Konoba Varos offre jambon dalmate et fromage de brebis, crevettes enrobées de bacon et riz, tiramisu local et vin blanc de l’île de Korcula.

À proximité de ce restaurant, au pied d’une superbe place, percée d’arcades et parée de couleurs rouge et blanc, on découvre le Kavana Laurus Bellevue. C’est un grand et vieux café, haut de plafond ; il fait songer à ces établissements austro – hongrois d’autrefois. Les murs sont décorés de toiles peintes dans les tons pastel. Chaises autour des guéridons, et banquettes, propices aux confidences, encadrant les tables s’offrent aux clients. En dégustant un verre de Malvazija, savoureux blanc d’Istrie, région du nord de la Croatie, on imagine que l’on y chuchotait quand le camarade Tito sévissait à Belgrade…

Antique palais - habitat contemporain
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Le Kavana Laurus Bellevue
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Cathédrale
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Vestibulum du palais de Dioclétien
Vestibulum du palais de Dioclétien
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Klapa Porat
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Klapa Porat
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Café Louxor
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Café Louxor
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Café Louxor
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Podrumi
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Podrumi
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Podrumi
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Mercredi 23 juillet

SPLIT

DU MAUSOLEE AU SOUS-SOL DU PALAIS

Ce matin, on gravit les marches du clocher vertigineux de la cathédrale. De cette hauteur, la vue sur le domaine palatial, les toits de tuile rouge de la cité et la mer comble le regard. Soudain, des voix retentissent ; l’effet est magique ! C’est le chant d’une klapa*. La klapa Porat chante chaque matin, de huit à dix heures, dans le vestibulum du palais, une salle cylindrique à ciel ouvert dont la coupole a disparu. Décor et acoustique confinent à l’idéal pour accueillir ces cinq voix mâles.

La cathédrale est l’ancien mausolée de Dioclétien, une ronde construction soutenue par huit colonnes de l’ordre corinthien. Elle est dédiée à un saint martyrisé sur ordre de… Dioclétien ! À l’étage, « le trésor » témoigne de l’ancienneté du culte catholique à Split ainsi que de l’influence de Byzance sur « l’iconographie » comme l’illustrent trois madones à l’enfant. Au sous-sol, la crypte tout en pierre, voûtée, est ceinte de huit absidioles. Son dépouillement incite au recueillement.

Au Louxor, vieux café au charme désuet, un thé est le bienvenu.

Aujourd’hui, le ciel s’accommode de la course des nuages, qui vont sous le souffle léger du vent et n’encouragent guère le soleil à briller. Podrumi est ce labyrinthe de souterrains creusés sous le palais, sans doute d’anciens entrepôts dont la démesure est à l’échelle de cet édifice aux dimensions extravagantes. Elles contribuent à assurer la renommée posthume de cet empereur.

Au Tifani, le repas succulent est arrosé d’un capiteux vin rouge Peljesac, vignoble situé sur la route de Dubrovnik, face à l’île de Korcula ; on le dénomme aussi Dingac.

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*klapa : « groupe d’hommes liés par des intérêts communs, principalement des rapports amicaux ». En fait, ensemble vocal, généralement masculin.

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Eglise Saint Nicolas
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Eglise Saint Nicolas
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Eglise Saint Nicolas
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BALADE EN SOLITUDE

Au milieu de l’après -midi, marche en direction de Veli Varos, quartier accroché au flanc oriental de la colline du Marjan, faubourg populaire peuplé au moyen – âge de paysans et de pêcheurs. C’est un lacis de ruelles escarpées le long desquelles s’alignent jardinets et maisons du XVII° siècle. Il se déploie autour d’une église, Saint Nicolas, de style roman, peut – être du XI° siècle. Son toit, fait de pierre, est une curiosité. On y accède par la venelle Jerina, perpendiculaire à la rue Sperun.

L’ascension du Marjan, jusqu’au bois qui en coiffe le sommet, est un parcours solitaire. En ce parc protégé, le silence règne. Seul le souffle du vent, la stridulation de l’insecte ou les trilles de l’oiseau chantent la vie. La nature est grandiose au sein de ce bois peuplé d’essences méditerranéennes et, dans cette immensité, la solitude est un viatique. À travers les frondaisons, le regard s’attarde à contempler l’étendue de la mer et, dans les lointains, la crête des montagnes… Comme de gros insectes, les bateaux, là – bas, avancent lentement et leur sillage trace sur l’onde une cicatrice d’écume. Un escalier interminable conduit au sommet. Le panorama offre une saisissante beauté : montagnes dressées d’un côté, îles alanguies de l’autre. Gris, le ciel se charge de quelques gouttes de pluie dont le vent accélère la course. Ce temps maussade accompagne la descente, que l’on interrompt à la hauteur de la modeste chapelle Saint – Nicolas : on y jouit d’une vue enviable sur le paysage. Un peu plus bas, on reprend son souffle au belvédère de Vidilica d’où l’on domine le palais de l’empereur. La promenade prend fin au petit port de pêche et à l’église Saint – Franc voisine.

Médiocre dîner de dupe au Tifani : potage de légumes, dont la consistance a des accents de ragoût rustique, et strogonoff déguisé en goulash : les mets jouent aux travestis ! Seul le dessert et le vin Peljesac, authentiques, procurent quelques menus plaisirs.

À l’extérieur, la température n’incite guère aux extravagances ; il fait froid. Pourtant, je ne résiste pas à la tentation d’écouter, dans le grandiose décor du péristyle, la fin du Nabucco de Verdi : en ce cadre, le célèbre chœur résonne d’accents encore plus pathétiques. Mais pourquoi ces quelques trentenaires dépenaillés ricanent-ils ?

IRRESPECT

Courte nuit : les voisins sont bruyants comme souvent le sont les touristes. Maudits soient ces faquins ! En ce pays, quelle que soit la nationalité des vacanciers, tout semble « permis ». À Split, les visiteurs étrangers arborent des tenues vestimentaires négligées, voire indécentes et sales. La visite de la cathédrale est, à cet égard, édifiante : femmes fort dénudées, hommes portant short et chapeau de plage, enfants turbulents qui, à l’occasion, ne dédaignent pas le cornet de glace ! Toutes choses incongrues dans un lieu du culte, quelle que soit la religion que l’on professe ou pas. Elles sont d’ailleurs interdites mais, semble- t-il, plus ou moins tolérées ici. Ailleurs, ni les mosquées, ni les synagogues, ni les pagodes ni même les temples balinais ne les autorisent. Mais l’occident, il est vrai, se fout, désormais, de la religion en général et du christianisme en particulier. Sous nos latitudes, le mot respect est obsolète.

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Gravissant la colline du Marjan
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Gravissant la colline du Marjan
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Gravissant la colline du Marjan
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Gravissant la colline du Marjan
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Descendant la colline du Marjan, Chapelle Saint Nicolas.
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Descendant la colline du Marjan, Chapelle Saint Nicolas.
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Descendant la colline du Marjan, vue du belvédère de Vidilica
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Rue pavée de marbre, nocturne
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Rue pavée de marbre, diurne
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Jeudi 24 juillet

SPLIT

DIOCLETIEN, JUPITER ET JESUS

Ce matin, le ciel coiffe le péristyle d’un toit de couleur grise : placette rectangulaire de trente – cinq mètres sur treize, il est le cœur du palais. Trois de ses côtés alignent des colonnes : deux fois six colonnes et, enfin, quatre autres. À gauche, s’élève le mausolée – cathédrale, à droite, le temple de Jupiter. En cet espace s’accomplissait le culte de l’empereur. À la tribune, il apparaissait à ses fidèles. Celle – ci communique avec le vestibulum dont la coupole disparue était autrefois ornée de mosaïques. La klapa qui, hier, y chantait a également disparu…

Une nouvelle visite de la cathédrale Saint – Domnius s’apparente à une leçon d’histoire de l’art. Consacrée en 650, elle offre un véritable catalogue des styles : portique et structure octogonale hérités de l’antiquité et deux séries de quatorze scènes de la vie du Christ, sculptées en 1214 dans les vantaux en noyer du portail d’entrée ; à l’intérieur, frise supérieure représentant des scènes de chasse dans l’antiquité, huit colonnes de l’ordre corinthien, stalles du XIII° siècle empruntant aux styles byzantin et roman, chaire romane en pierre et en marbre des XIII° et XIV° siècles et autel du XV°. Ce mélange des styles et des époques, pour déroutant qu’il puisse être, n’entame pas la beauté des lieux.

Au temple de Jupiter
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Au temple de Jupiter, baptistère Saint Jean
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Au temple de Jupiter, plafond à caissons.
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Au temple de Jupiter, Saint Jean Baptiste, sculpture de Ivan Mestrovic.
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Au temple de Jupiter, entrelacs de la cuve cruciforme des fonts baptismaux.
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Au temple de Jupiter, bas-relief de la cuve.
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Statue de Grégoire de Nin ou de Nysse (Grgur Ninski), sculptée par Ivan Mestrovic
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Statue de Grégoire de Nin ou de Nysse (Grgur Ninski), sculptée par Ivan Mestrovic
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Statue de Grégoire de Nin ou de Nysse (Grgur Ninski), sculptée par Ivan Mestrovic
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Statue de Grégoire de Nin ou de Nysse (Grgur Ninski), sculptée par Ivan Mestrovic
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Le temple de Jupiter est gardé par un sphinx égyptien : sans doute décapité, il a perdu la tête. Aux IX° – X° siècles, ce temple devient le baptistère Saint – Jean de la cathédrale. Sa voûte à caissons d’origine abrite, dès lors, des fonts baptismaux des XI°- XII° siècles. « La cuve cruciforme, explique le guide, est ornée d’entrelacs géométriques et d’un magnifique bas – relief représentant un roi assis sur son trône, un serviteur à ses pieds et un autre à son côté. » La statue en bronze de Saint – Jean Baptiste domine l’ensemble. Pour admirer le tympan triangulaire du temple, il faut le contourner en se faufilant dans l’étroite venelle que les Splitois surnomment joliment le « laissez- moi passer »… Pressés, les touristes passent rapidement d’un trésor à l’autre sans prendre le temps d’apprécier. Ils sont venus, ils ont vu mais, ils n’ont pas vaincu leur fébrilité.

On marche, ensuite, jusqu’à la Zlatna Vrata, la Porte d’Or, l’une des plus imposantes portes de la cité. Et, selon l’usage, on s’empresse alors de toucher le gros orteil de la statue monumentale en bronze de Grégoire de Nysse (335-395) : cela porte bonheur, dit – on ! Grgur Ninski ou Grégoire de Nin, ou encore, de Nysse, est ainsi honoré pour avoir défendu la langue slave contre le latin.

On poursuit la balade et on admire successivement la chapelle médiévale Saint – Martin, l’élégante loggia d’une demeure patricienne, la cour d’une maison noble -métamorphosée aujourd’hui en restaurant- son bel escalier et ses armoiries… On croise un marchand de maïs ambulant et un mendiant, personnage apparemment moins répandu ici qu’à Paris. On s’attarde ensuite au marché aux poissons, semble-t-il, bien approvisionné.

Le déjeuner honore la mer : délicieux filets de poisson frais, accompagnés de riz et arrosés d’un capiteux vin blanc de Slavonie, province du nord du pays. Les vacanciers, pour la plupart, négligent la cuisine locale ; ils se nourrissent dans les mangeoires de la restauration rapide internationale et s’abreuvent de sodas et d’eau.

APOXIOMENOS LE BEL

Au milieu de l’après – midi, incursion au musée archéologique Osijek, sis dans une ancienne demeure patricienne restaurée. Il abrite en particulier la magnifique statue antique, en bronze, de l’athlète Apoxiomenos. Découverte au fond de la mer, au XIX° siècle, elle fût remarquablement remise en état. L’homme, sans doute un lutteur, est debout; il est nu, la tête légèrement inclinée et, ses deux mains délicates à proximité du sexe : à l’issue de l’épreuve, il procède à sa toilette. Les athlètes concouraient nus et le corps enduit d’huile. Leur peau se couvrait de la poussière ou du sable de l’arène dont ils devaient ensuite se débarrasser. Son beau visage, que barrent des lèvres sensuelles, est couronné de cheveux ondulés. Son corps, musclé, repose, en un léger déséquilibre, sur un pied droit posé sur le sol et un pied gauche à peine appuyé sur la plante. Ce corps, vieux d’une vingtaine de siècles, évoque la force, la beauté et la vie. Il vit, en effet, et le contemplant, on s’attend à le voir esquisser un mouvement.

L'athlète Apoxiomenos
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L'athlète Apoxiomenos
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L'athlète Apoxiomenos
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L'athlète Apoxiomenos
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Au fil des étages, la suite de la visite inventorie quelques-unes des traditions croates, à la notable exception du patrimoine musical local, regrettable lacune. Les costumes s’éclairent de couleurs vives, sauf à Split ; ils témoignent de l’enracinement géographique d’un individu et participent à son identité. Les lourds bijoux, les fines dentelles, les armes richement ornées, les meubles utilitaires tels que les coffres et les sièges, les outils… sont ornés de motifs décoratifs qui empruntent essentiellement à la flore, parfois à la faune, et à la géométrie. Ils attestent la beauté d’un artisanat qui embellissait le quotidien des êtres les plus modestes.

C’est l’heure ! Les vieux du coin s’assoient sur les bancs du petit port de pêche et contemplent le paysage : l’ile de Brac et l’île de Solta, posées sur la mer. Sur la promenade qui court sur la rive, de jeunes danseurs locaux, fiers de leur corps, s’exercent à leur art acrobatique et spectaculaire : hip, ils virevoltent et, hop !

En début de soirée, la sirène d’un bateau tout pavoisé de lumière hurle. C’est l’heure ! Un taxi file vers le Boban, restaurant renommé, situé assez loin du vieux centre – ville. Une large terrasse, à l’ombre des palmiers, est l’antichambre d’un vaste restaurant. On y déguste de fines tranches de jambon dalmate, des médaillons de veau gratinés, accommodés à l’huile d’olive, à la crème, à l’ail et aux truffes d’Istrie (un délice !), le tout arrosé successivement d’un vin rouge dalmate Babic Barrique de Sibenik (un peu vert) et d’un bon Zlatan Plavac de Hvar. Comme dans la plupart des restaurants, ici comme ailleurs, le prix du vin est excessif si ce n’est dissuasif.

Dernière incursion au péristyle, désert à cette heure tardive et silencieux. Seul un jeune-homme, assis sur les marches, face au tympan, dessine de la main gauche…

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Musée archéologique Osijek
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Gare routière." Je cherche des hôtes."
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Vendredi 25 juillet

SPLIT – OMIS

À l’heure du déjeuner, un bar grillé excite l’arôme d’un vin blanc de Slavonie.

En tout début d’après – midi, derrière l’un des guichets de la gare routière, l’agent de la compagnie de cars est aimable comme un fonctionnaire titiste ! Smile !

Enfin, le bus s’ébranle, traverse la banlieue de la ville, triste et laide comme une banlieue, longe la côte ourlée de petites plages plus ou moins riches de sable et peuplées de vacanciers, jusqu’à Omis.

Là, l’arrêt du bus est aussi discret qu’un opposant sous Tito et dépourvu du moindre taxi ! On marche donc jusqu’à cet escalier vertigineux dont les cents – sept marches conduisent au Dvor hotel. Eprouvante ascension mais, de cette éminence, on découvre les massifs montagneux, une forteresse vénitienne et la rivière Cetina. Elle fût, au moyen – âge, le refuge des pirates. Tandis que l’on contemple ce paysage sauvage, le ciel s’endeuille…

LA BOUTIQUE DE SOUVENIRS DE LA RUE KATUSICA

En fin d’après – midi, sous l’averse, on s’achemine vers le centre de la vieille bourgade. Omis s’apprête à vivre la quarante – deuxième édition du festival des klape: « les billets sont disponibles à la boutique de souvenirs de la rue Katusica », m’a- t- on dit. On dirait un message codé : « les billets sont disponibles à la boutique de souvenirs de la rue Katusica » ! Les précieux billets devrait-on écrire : le festival connaît un tel succès qu’ils sont, depuis longtemps, introuvables. Imprévoyants s’abstenir !

Omis, c’est un village corse ! Un village de pierre qui prospère au pied d’une forteresse vénitienne ; ses ruelles, pavées et pittoresques, sont envahies par les touristes. Sur une petite place, au pied de l’église, une scène est dressée. Dans les restaurants, des familles entières de vacanciers étrangers, dépenaillés et soucieux de leurs deniers, picorent tandis que leurs enfants, tête posée sur la table, revendiqueraient volontiers le droit au sommeil. À l’auberge Caca (prononcer chacha), le dîner se compose d’un plat de viandes arrosé d’un vin rouge frais d’Omis. Les saucisses maison recèlent des parfums et des saveurs d’Orient qui réjouissent les sens. En revanche, les crêpes ne méritent guère que l’on s’en souvienne.

Omis, Forteresse vénitienne.
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Chez caca.
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UNE KLAPA, DES KLAPE

À vingt et une heures trente, soit avec les trente minutes de retard que le sud tolère, le couple de présentateurs, un tantinet ringard, ouvre la soirée de la compétition féminine. La klapa Spirit de Split ayant déclaré forfait, neuf klape composées de femmes restent en lice. Un public attentif, dont les touristes sont absents, peuple les travées de la place. Assis au deuxième rang, je suis le voisin du docteur P., membre du jury, un jury constitué de doctes docteurs : le festival est donc une compétition. Pour l’heure, j’ignore les critères retenus pour juger : comment hiérarchiser les splendeurs de ces chants ? C’est encore plus embarrassant pour l’étranger qui n’entend pas la langue et ignore le sens des paroles.

Habillées avec une sobre élégance, les filles sont jeunes et, pour la plupart, belles. Elles chantent avec fierté, certaines les mains plantées sur les hanches. On apprécie ce beau chant articulé, ciselé par ces voix posées, tessitures de soprano et d’alto, toujours justes bien sûr. Comme dans le chant grégorien, les finales sont légèrement amorties. Plusieurs de ces klape retiennent l’attention de l’amateur ignorant des paroles : Garofuli de Bibinje, Teranke de Pula, Ardura de Split, Falindo de Dubrovnik et Neverin de Kastel Luksic. À la fin, le public patiente puis, les notes du jury sont affichées et les résultats proclamés : prix du jury et prix du public. Reste à entreprendre l’ascension des volées de marches du Dvor hotel !

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Klapa féminine.
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Klapa féminine.
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Klapa féminine.
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Klapa féminine.
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Klapa féminine.
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Klapa féminine.
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Samedi 26 juillet

OMIS

FJORDS DALMATES

En fin de matinée, on embarque à bord d’une barque, tendue d’une toile bleu et blanc, en compagnie de quatre touristes. À la barre, Ivan, un jeune – homme de seize ans. On navigue pendant deux heures sur les eaux des gorges de la Cetina, bercés par les crachotements du moteur. L’éclat du soleil matinal dévoile un grandiose paysage de canyon : la rivière est bordée de vieux massifs érodés qui apparaissent et disparaissent au fil des méandres. La succession, voire le chevauchement de ces éminences trapues et arrondies ainsi que de falaises abruptes de couleur gris blanc, dont nombre de sommets, certains arasés et plats, sont pelés, suscite l’émerveillement. Les courbes des montagnes et les sinuosités de la rivière s’épousent et créent une harmonie naturelle. À l’occasion, le miroir de l’eau reflète ce répertoire de formes et masque algues et roches qui tapissent le creux de son lit.

La végétation est méditerranéenne, maritime et lacustre : des cyprès se dressent comme des sentinelles, une armée de pins se juche sur les cimes et dévale le flanc des montagnes, soumis des saules pleureurs s’inclinent vers le sol, une piétaille de roseaux et de joncs se déploie en nombre. Ici et là, racines et branches caressent l’onde ou s’y enfoncent comme dans une mangrove. Deux cygnes blancs croisent à proximité de la berge, des canards frôlent la surface de l’eau pour prendre leur envol, divers gibiers d’eau peuplent les rives et des libellules ajoutent la grâce de leur vol à cette calme beauté de la nature.

Creusée dans la roche, une niche abrite une statue de la Vierge. Sculptures inédites, des arbres – morts émergent. À Radmanove Mlinice, l’escale éloignée de sept kilomètres du point de départ, un bouquet d’arbres figure une création que l’on jurerait imaginée par un artiste… Et voilà que des rafters surgissent qui, sans doute à la poursuite de pirates, descendent la rivière.

Le retour accorde au visiteur une seconde chance de se délecter de l’ineffable beauté de la nature. À Omis, déjeuner au Pod Odrom : brochette de lotte au bacon, risotto à la crème, crêpes et médiocre vin blanc du sud dont le palais effacera le souvenir.

La rivière Cetina
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La rivière Cetina
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La rivière Cetina
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La rivière Cetina
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La rivière Cetina
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La rivière Cetina
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La rivière Cetina
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La rivière Cetina
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La rivière Cetina
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La rivière Cetina
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MALES KLAPE

En tout début de soirée, on gagne la place du festival, déjà envahie par la foule. Ce soir, la finale des klape masculines est retransmise en direct par la HRT, la télévision croate. Voilà qui épargnera aux téléspectateurs feuilletons et dessins animés américains… Les premiers rangs sont occupés par les autorités civiles et religieuses ainsi que par les membres du jury. On ne voit guère de policiers, ni ici ni ailleurs. Direct oblige, la soirée commence à l’heure. Douze klape masculines, originaires de diverses villes du pays, défilent et interprètent chacune deux chants, soit, pour la plupart, un thème traditionnel et une composition. On suppose que le jury note les qualités vocales (justesse, phrasé, timbre…), les textes, l’interprétation (sensibilité, complicité, plaisir…) et les arrangements vocaux pour tessitures ténor, baryton et basse. Souvent sobres, les costumes participent au plaisir esthétique.

Ce chant dalmate est quête de perfection. Il ne présente ni aspérités ni rugosités aucune. Il est peaufiné à l’extrême : « trop parfait », regrettent les imbéciles. Magiciens, ses interprètes métamorphosent les âpres sonorités de la langue croate en un chant, suave comme le miel, qui enchante l’oreille.

Chacun des sept juges attribue une note de zéro à dix. Ensuite, pour chaque klapa, on élimine la note la plus haute et la plus basse, « comme pour les épreuves du saut à ski », dit- on. Le total le plus élevé désigne le vainqueur. En ce qui concerne le prix du public, à l’issue du concert, chaque spectateur déchire sur son billet le numéro de sa klapa favorite (chacune porte un numéro qui figure sur chaque billet) et le dépose dans le petit sac que lui présente une hôtesse.

Il est tard. Les membres des klape vagabondent dans les rues étroites du village : un autre bar, un autre verre… On connaît la chanson !

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