LAOS
UNE TERRE D’ESPOIR ?

21 OCTOBRE – 3 NOVEMBRE 2007

Affiche Cambodge Vietnam Laos Victoire (DR)

Affiche Cambodge Vietnam Laos Victoire (DR)


 
 

REPERES
 

HISTOIRE

L’histoire de ce petit pays enclavé entre le Cambodge, au sud, la Thaïlande, à l’ouest, le Vietnam, à l’est, est complexe et tourmentée. Au cours des siècles, elle fut souvent tributaire des relations tumultueuses avec les Thaïs et les Khmers. En 1893, le roi de Luang Prabang requit la protection de la France ; celle-ci se contentera de contrôler cet « Etat- tampon » féodal afin de contrer l’influence britannique.

A la déclaration unilatérale d’indépendance, en octobre 1945, succède une période troublée qui se prolonge jusqu’à la victoire des communistes du Parti Révolutionnaire du Peuple Lao (PRPL), en décembre 1975. Au cours des mois précédents, environ 300 000 Laotiens, dit-on, opposants, aristocrates et cadres de l’économie émigrèrent en Thaïlande, en Amérique du nord et en France. Jusqu’à ce jour, les communistes demeurent au pouvoir.

Depuis 1997, le Laos est membre de l’Association des nations du Sud-Est Asiatique (ASEAN).

GEOGRAPHIE

Pays le plus pauvre de l’Asie du sud-est, le Laos est « un pays enclavé, sous-peuplé et ethniquement divers », écrit Bruno Philip (« Le Monde », 13/7/2012).

-Superficie : 236 800 km2

-Population : 7 millions (dont 11% de Khmou et 8% de Hmong ou Méos, entre autres)

-Religion : bouddhisme (65% de la population)

-Capitale : Vientiane, 750 000 habitants

-Espérance de vie : 54 ans (2005)

-Economie :

* forêts (70% du territoire en 1940, 40% en 2005), pêche et agriculture, sur seulement 8% des terres cultivables (le riz croît sur 70% de ces terres), occupent 75% de la population active et génère environ 50% du PIB,

*industrie : seule existe une industrie textile. Les biens de consommation sont importés de Thaïlande.

*les ressources minières, importantes, constituent un potentiel de développement.

*hydroélectricité : exportée en Thaïlande. Nombreux projets de développement.

En 2011, la Chine devient le premier investisseur au Laos, devant le Vietnam et la Thaïlande. Cependant, divers projets économiques sino-laotiens sont reportés sine die.

LEXIQUE

HUI OU KHOUI : flûte de bois ou de bambou

JATAKA : illustration de la vie de Bouddha

KHENE : orgue à bouche

KHOUI ou HUI : flûte de bois ou de bambou

KIM : cithare

KIP : monnaie nationale

KHONG HAN : tambour

KHONG VONG : tambour grave

LANAT ou RANAT : xylophone

NAGA : serpent

PHIN : luth trois cordes

RANAT ou LANAT : xylophone

SA : cymbales

SAMLO : sorte de side-car

SAW HI : violon

SAW HU : violon tonalité grave

SIM : sanctuaire central

SING : cymbalettes

STUPA : (mot sanskrit) structure architecturale bouddhique de forme conique

TAPOON : tambour bi-faces

TUK -TUK : moto-taxi

VOT : flûte tournante  

WAT : temple-monastère

 
 

JOURNAL DE VOYAGE

Arrivée à Bangkok (Thaïlande) à 6 heures 25 locales (il est 1 heure 25 à Paris). Nous sommes le lundi 22 octobre.

LUNDI 22 OCTOBRE

VIENTIANE

L’embarquement pour Vientiane, capitale du Laos, est prévu à 6 heures 55. Voilà qui laisse peu de temps pour sortir de l’avion et parcourir la longue litanie de tapis roulant qui traversent les vastes halls de ce nouvel aéroport : édifié en béton, acier, verre et même toile, il épouse la forme d’un H. L’appareil décolle à 7 heures 35. Une heure plus tard, on atterrit à Vientiane dont les abords sont verdoyants. Je fais deux fois la queue pendant… une heure trente pour obtenir mon visa d’entrée : la bureaucratie à l’œuvre ! Le Laos est un pays communiste. Quatre fonctionnaires successifs pour délivrer ce foutu visa. Prendre son temps, c’est aussi affirmer son autorité.

Aux alentours de dix heures, le chauffeur du Centre Culturel Français (C.C.F.) me conduit, en une quinzaine de minutes, à l’hôtel Chanthapanya, situé au centre- ville. La chambre est agréable ; en ce qui concerne le calme, on jugera ce soir…

Court repos puis, déjeuner avec une collaboratrice du C.C.F. au Café Indochine : cadre agréable et mets savoureux. Opération de change sur l’avenue qui borde le Mékong, perpendiculaire à celle où est situé l’hôtel. Cette rue, que dominent de belles façades (coloniales ?), longe donc les eaux boueuses du fleuve : il coule gris clair sous le soleil ardent,  dans la moiteur du jour. C’est l’époque de la fête de la lumière (et des pirogues ?) : restaurants et baraques foraines se sont installés sur la berge. Des deux côtés de la rue, des étals proposent aux chalands victuailles, casquettes, chaussures, chemises, pantalons « made in Laos », etc. De nombreux marchands ambulants déambulent, ainsi que des lycéens en balade… Il fait chaud.

Façades sur une rive du Mekong
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Façades sur une rive du Mekong
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Le Mekong
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Étals au bord du Mekong
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Chamboultou
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Le centre de la ville, semble-t-il, n’est pas (encore ?) encombré de hauts immeubles. En fin d’après-midi, on se dirige vers l’école des Beaux-Arts, en fait une école (conservatoire ?) de musique et de danse, située au diable vauvert, derrière des… terrains de football !

« La musique laotienne présente de nombreuses similitudes avec ses voisines immédiates : la musique cambodgienne, la musique vietnamienne et surtout la musique thaïlandaise, l’ethnie lao étant d’ailleurs très forte dans ce pays depuis l’annexion d’une partie du Laos par le Siam en 1828.

Cette musique serait née pour égaler celle d’Angkor, au Cambodge.(…)

Le Laos apparaît comme un sanctuaire musical puisqu’on y trouve trace d’une antique gamme indienne qui a disparue en Inde, la Gandhara grama… »  (source Wikipedia)
 

Ecole des beaux-arts / Danse "La Grande Victoire"
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L'orchestre de l'École des Beaux-Arts : au fond à gauche, le tapoon. Au premier plan, de gauche à droite : ranat, kim et ranat basse. Derrière le premier ranat, on aperçoit le manche de la vièle Saw Hi, derrière le Kim, la vièle Saw Hu.
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Danse avec le khene, de la provice de Phongsaly (Nord du Laos)
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Danse Hmong
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Khenes au repos
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Précarité

Un professeur, Bounthavisay Bounxouei, nous accueille. Il a fait ses études en Bulgarie pendant de longues années et a épousé une pianiste. Il est père de deux filles. Son salaire n’excède pas soixante dollars par mois. Il confie que l’électricité seule lui revient à quatre-vingt-dix dollars. Un comble quand on sait que le Laos est producteur d’énergie hydro-électrique… exportée, entre autres, en Thaïlande. Il se désole également du manque de moyens dont dispose l’école de musique et du fait que professeurs comme élèves sont contraints de travailler le soir : ils se produisent dans ces grands restaurants que fréquentent les touristes. Quant à lui, pour augmenter ses revenus, il restaure les pianos… Le terrain est prêt à recevoir un nouvel édifice qui devrait être construit avec le concours du Vietnam, pays frère. Mais, dit-il, « il n’y a pas de budget. Au Laos, les choses avancent toujours très lentement » (on songe à la procédure de délivrance des visas, par exemple) ; ou bien, elles n’avancent pas.

Musique et danse

Le professeur me présente un programme dactylographié comportant quatre pièces. Il me dira plus tard que c’est le programme prévu pour la réunion inter- ministérielle francophone à Vientiane, en novembre. J’ai donc, provisoirement, rang de ministre, dis-je. Il rigole !

L’orchestre, veste blanche col mao, est prêt : il est composé d’un tambour tapoon, d’un autre tambour khong han et d’un autre encore plus grave khong vong et d’un khong vong aigu, de deux violons saw hi et saw hu (grave), d’une flûte khoui, d’un xylophone ranat solo et d’un autre basse, d’une cithare kim, de cymbales sa et de cymbalettes sing, d’un orgue à bouche khene et d’une voix de femme.

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C’est un ensemble de professeurs qui accompagne un corps de danseurs, élèves de l’école. Ecoutons et voyons :

1- Le premier thème, « la grande victoire », est une danse originaire d’un village du centre, Mahaxay. Créée pour célébrer l’issue victorieuse d’une bataille, elle participe aujourd’hui à la fête qui couronne une moisson féconde. Six danseuses, jeunes et gracieuses, évoluent, parées d’un bleu lardé de vert.

2- Pièce traditionnelle de la tribu Bhounoy, province de Phongsaly (au nord du pays, à la frontière avec la Chine), interprétée au nouvel an ou bien au sein d’une maison neuve afin que le bonheur y règne. Trois couples dansent sur un rythme rapide. Les garçons soufflent pour mimer le jeu du khene (orgue à bouche). L’un d’entre eux est particulièrement agile et gracieux.

3- Un jeune couple de danseurs lao danse une danse de la minorité hmong. Les musiciens ne jouent pas, la musique est diffusée par la sonorisation. La jeune-fille évolue d’abord seule, munie d’un parapluie rouge. Le garçon gracieux et agile de la danse précédente entre ensuite en scène… C’est une danse amoureuse entre un homme et une femme, qui ont succombé à l’amour dans un champ de maïs.

4- Deux voix de femmes escortent la danse. Elle est composée des danses « d’une dizaine d’ethnies ». Huit jeunes-filles, portant chacune le costume d’une ethnie, évoluent. Le message est politique, le propos artistique artificiel. Sans intérêt !

Dans cette école, quarante professeurs de musique et de danse (leur nombre est insuffisant) enseignent à des élèves originaires de Vientiane (ils vivent chez leurs parents) et de province : ils demeurent à l’école, en dortoirs (filles d’un côté, garçons de l’autre), et les parents envoient argent et sacs de riz pour les repas… Ils intègrent l’école après un examen, à l’âge de douze ans. Jusqu’à seize ans, ils suivent le cycle des débutants, puis, de dix-sept à dix-neuf ans, celui du lycée (high school). Un diplôme sanctionne les sept ans d’étude. Il ne reste plus, ensuite, qu’à trouver du travail…

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MARDI 23 OCTOBRE

En début de matinée, on s’achemine à nouveau vers l’école des Beaux- Arts. Il fait chaud et la circulation des deux- roues à moteur, intempestive et anarchique, empoisonne l’atmosphère. Dans les locaux de l’école, des élèves répètent, d’autres vont et viennent… Un garçon chante en s’accompagnant à la guitare.

Dans la grande salle, ce matin, l’orchestre des professeurs attend. Il jouera successivement en formation maholy et pee phart, même distinction qu’en Thaïlande et vocabulaire quasi identique.

Le maholy orchestra se compose d’un tambour tapoon, de deux xylophones ranat (dont l’un frappé avec des maillets souples) et d’une cithare kim, de deux saw (hi et hu), de cymbalettes et de voix. Il interprète deux chants (pheng), l’un d’hommage, lent et suave, dont le rythme s’accélère au final, l’autre de fête.

Le pee phart orchestra comprend un tambour tapoon et deux khong vong, deux xylophones ranat (dont l’un frappé avec des maillets durs), deux paires de cymbalettes, une de castagnettes en bois et une voix. Il interprète deux thèmes : pour le premier, chant des rizières, l’ensemble est augmenté de deux autres tambours ; le second, mélodieux, est un chant de fête.

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Peu avant midi, visite du centre culturel français. C’est un vaste ensemble dont la cafétéria ouvre sur un jardin. Il comporte un auditorium de 120 places, une bibliothèque riche de 17000 volumes et, un terrain de … pétanque, jeu fort prisé par les Laotiens.

Au café Indochine, je déjeune d’un « bœuf aux cinq herbes » et de thé vert pour 4700 kip, l’équivalent de quatre euros !

Je gagne à pied la place Nam Phou et marche dans cette rue qui descend vers le Mékong. Sur la gauche, se trouvent les bureaux de Lao Airlines. J’y retire mon billet pour Luang Prabang, l’ancienne capitale : 1 200 000 kip aller et retour, soit 120 dollars. Il faut confirmer le vol la veille (changement d’horaire possible) et se présenter quatre-vingt-dix minutes avant le décollage !

Cérémonie

Retour en longeant la rive du fleuve. Je découvre un temple. Au pied d’un vieux banian, se déroule une cérémonie bouddhiste : cinq moines, jeunes, vêtus de safran, prient face à trois personnes dont une femme. Les moines tiennent dans leurs mains jointes une longue cordelette… A leur gauche un feu se consume. Plus loin des robes couleur safran sèchent sur un fil.

Conversation avec un moine

A l’issue de la cérémonie, l’un des moines, âgé de vingt-deux ans, commente en anglais à mon intention : c’était une cérémonie de bénédiction à la requête des trois fidèles présents, désireux de se faire pardonner une mauvaise action. Ce jeune religieux raconte qu’il est arrivé d’une province proche de la frontière thaïe il y a trois ans. Il est entré en religion voilà déjà sept ans ; il avait alors quinze ans. Il est moine ; on peut l’être à partir de l’âge de vingt ans. Il ne saurait dire aujourd’hui s’il le restera toute sa vie. A l’heure actuelle, il étudie le bouddhisme dans un institut spécialisé. Chaque matin, il mendie sa nourriture. Il ne consomme ni alcool ni viande. Il s’abstient de tout contact avec les femmes ; seule sa mère a le droit de le toucher ; il ne l’a pas vue depuis trois ans. Il ne possède rien, sauf quelques objets utilitaires. Il craint, dit-il, les festivités en cours car, il n’aime pas le bruit. Je lui tire le portrait et cela l’intimide. Il m’invite à venir le revoir dans ce temple qui abrite douze moines et dix-huit novices.

Temple Cérémonie d'expiation
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Temple Cérémonie d'expiation
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Temple : édifice du tambour d'appel
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MERCREDI 24 OCTOBRE

Tuk -tuk

A dix heures, je tente de persuader la réception de l’hôtel de négocier le tarif d’un tuk-tuk (moto taxi) à mon intention. Un appel téléphonique suscite l’arrivée de celui attaché à l’hôtel. L’homme ne présente pas un visage avenant et se montre gourmand : 60 000 kip pour aller à Wat That Luang, distant de quatre kilomètres, et Wat Sisaket… Je propose 50 000 ; il refuse. Je réussis à convaincre le chef de réception de m’assister : il donne des instructions. Un second tuk-tuk arrive. Le premier est toujours là ; il s’incrustera pour faire obstruction. Ils se parlent. Après quelques palabres, le dernier arrivé propose 30 000 kip, soit la moitié moins que le précédent ! Je monte. Au premier carrefour, il me prie de descendre et de poursuivre avec un de ses collègues car, dit-il, « c’est chacun son tour ». Je m’en vais. De retour à l’hôtel, j’éclate. Le chef de réception déclare qu’il ne connaît pas le tarif pour Wat That Luang. Et moi, je déclare forfait et regagne ma chambre. De telles palinodies exaspèrent le visiteur.

Peu après, je décide de marcher en m’éloignant du Mékong pour me diriger vers le centre. J’effectue un détour par That Dam, « le stupa noir », gardien, si l’on en croit la légende, d’un dragon à sept têtes ; celui-ci aurait protégé la ville lors des invasions siamoises. En fait, ce monument évoque une période tragique de l’histoire du Laos.

A proximité, se tient le marché dit du matin. On y trouve tout : de la machine à laver au téléphone portable ainsi que, entre autres, tout un étage dédié à la joaillerie, de beaux textiles lao, des vêtements, chaussures, ustensiles de cuisine…

Aux abords des trois halles de style traditionnel –elles sont vouées à la destruction-, des cohortes de marchands à la sauvette sollicitent le chaland et lui proposent beignets, poissons grillés, pommes… Une femme porte des objets en vannerie à l’aide d’un balancier… Il fait chaud. Je poursuis à pied, hélé tous les dix mètres par des tuk-tuk empressés. Je passe devant le CCF et, à droite, aperçois un temple, non identifié que je visite. A l’intérieur, une inscription indique son nom, Hosantinimit, temple construit entre 1995 et 1998. Ses ors et ses tuiles vermillon resplendissent sous l’éclat du soleil. Moines et novices vont et viennent ; des élèves en uniforme jouent dans la fraîcheur des frondaisons. A l’ombre d’un pavillon, des ouvriers cassent la croûte.

Je me dirige à nouveau vers le centre culturel français. Au bout de l’avenue Lane Xang, s’élève le Patuxai, un arc de triomphe kitsch ! Sous mes yeux, tandis que j’observe la circulation anarchique, deux camionnettes se téléscopent…

Délicieux déjeuner à la cafétéria du centre français : soupe de légumes, salade de fruits, yaourt coco, café et ganache miel et gingembre (40 000 kip).

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Le Stùpa Noir
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Marché du Matin
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Tuk-tuk, devant les trois halles du marché du Matin.
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L'avenue Lane Xang. Au fond le Patuxai.
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Le Patuxai
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Temple moderne (fin des années 90)
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Habitât des moines et des novices.
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Khene et molam

En début d’après-midi, l’Association des Joueurs de Khene Lao se produit dans les jardins du centre français, à mon intention. Le khene est un orgue à bouche que l’on trouve sous diverses formes dans plusieurs pays d’Asie. La présidente de l’association, madame Kongdeuane Nettavong, est un ancien maitre de cet instrument. L’association enseigne l’art du khene à 150 jeunes. Le joueur de khene n’utilise pas la technique du souffle circulaire. Il inspire profondément et fait ainsi provision d’air qu’il expire peu à peu.

Les musiciens joueront d’abord « les cinq rythmes de base avant d’interpréter des pièces construites sur ces rythmes. Certains imitent ceux de la nature, tel le vent ou le galop du troupeau… Quatre hommes alternent au khene pour me faire entendre ces « cinq rythmes de base » : sontsanéne,, posay, laysoy, long nhaï, long noï. Mais, il en existe d’autres : teuoi kiao, lam pheuone, lao phaen, tisang nam nong… Le teuoi kiao est joué par un soliste. Puis, un même ensemble (cymbalettes, luth tendu de trois cordes phin, tambour, castagnettes en bois et trois khenes) interprète lam pheuone, qui est dansé, lao phaen puis, tisang nam nong qui mixe plusieurs rythmes. On écoute ensuite un répertoire de molam. Ce style est soit une improvisation, soit un poème dont le thème de prédilection est l’amour : amour de la nature mais, surtout, amour de la femme. Depuis 1975, les autorités, me dit-on, ont recommandé aux chanteurs de molam de célébrer l’amour de la patrie… Mais, si j’en crois la présidente de l’association, cela ennuie le public… Au Laos, comme chez les Laotiens des Etats-Unis, le molam peut se prolonger pendant trois jours !

Molam Samane, soixante-douze ans, chante « Lamkone » (ou « Lamxant »), accompagné des sonorités d’un khene, tandis qu’une femme, Chanthala, danse. Suit une improvisation qui célèbre la France, l’amitié entre les deux pays… exercice obligé. Ensuite, le duo inverse les rôles : Molam Chanthala chante et Samane danse. Ces deux duos sont empreints de grâce et de beauté. Molam Somboune, un jeune homme, leur succède et interprète « Lam payouk », un moderne molam, accompagné de castagnettes, cymbalettes, d’un tambour et d’un khene. Cette prestation ne séduit guère.

Enfin, le même ensemble, auquel se greffe un flutiau, offre deux thèmes populaires : l’un de la province de Khammouane, l’autre de la province de Savannakhet.

On apprendra ensuite que, pour la plupart, ces musiciens gagnent leur vie en jouant dans les mariages. Cependant, l’un est coiffeur et facteur de khene. Le danseur et joueur de castagnettes enseigne le khene et, Molam Chanthala, le molam.

A 18 heures, nouveau programme à l’école des Beaux-Arts (école de musique), dans la grande salle qui « sert d’hôtel », la nuit, aux… poussins, qui piaillent à plein gosier !

Madame Kongdeuane Nettavong, maître de khène, et des musiciens de l'Association des joueurs de khène lao.
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Molam Somboune, Molam Samane et un joueur de khène.
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Molam Somboune.
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Ensemble de musique de Provinces.
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Phin, luth à trois cordes.
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Ensemble de khène de l'École des Beaux-Arts de Vientiane
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ENSEMBLE TRADITIONNEL DE MUSICIENS, VÊTUS D’UNE VESTE BLANCHE :

1- Khene vong (composition ?) :

Solo de khene de monsieur Khamsouan. Il est rejoint ensuite par neuf autres khenes. Mais, auparavant, il aura montré sa « virtuosité » : il joue en tournant son instrument dans diverses directions. C’est inutile et exaspérant !

2- « Dans le souffle du vent frais » : chant traditionnel, suave, de Pakse, au sud du pays.

3- Chant traditionnel de Luang Prabang :

La même formation, accompagne une autre chanteuse ; ils interprètent ce chant également suave et trop long pour une oreille occidentale !

4- Lao duang duane :

Ce « mois de la lune » appartient à la tradition de Vientiane ; chanté par une troisième interprète, il sonne aigre et nasillard.

5- Chant traditionnel de Vientiane également, lent et suave.

Les musiciens interprètent un pot-pourri de pièces traditionnelles de différentes provinces puis, ils revêtent une chemise rouge. L’ensemble se compose d’une grosse caisse, d’une basse, d’un set de trois percussions, d’une flute khoui, de cymbalettes, d’une guitare katjaphi, d’un khene, d’un tounglin (onze tubes de bambou que l’on frappe avec des semelles de tong), d’un xylophone, composé de vingt-deux bambous et martelé à l’aide de baguettes, et d’une voix. Le tounglin et le xylophone en bambou sont des instruments originaires des minorités.

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Les cinq pièces qui suivent interprétées par cet ensemble se veulent « modernes » mais, le son, électrifié, est sale et détruit sans doute la beauté originelle de ce répertoire traditionnel : « khapngum » (nord de Vientiane), « Lam Saravan », chanson populaire du sud, à la frontière khmère, une sorte de « Jacques a dit », ici, hélas ! Modernisée. Ensuite, monsieur Khamsouan montre à nouveau tout ce qu’il sait faire, c’est-à-dire, un solo de flûtiau (instrument entendu dans le répertoire de molam), un solo de khene, un solo de vot (on aspire le t de ce mot), une flûte tournante. Suit un duo de khene (on ne l’entend guère) et de guitare katjaphi, invention de monsieur Khamsouan qui sonne comme une vieille guitare électrique. Enfin, tous les instruments de bambou offrent un final. Cette seconde partie « moderne » est insupportable pour une oreille occidentale ! Les communautés lao à l’étranger, me dit-on, aiment beaucoup : tant pis ! Les jeunes qui, à l’extérieur de la pièce, écoutent aussi. Tant pis pour eux également ! Est-ce utile de rappeler à ces musiciens cette évidence : plus vous serez lao, plus vous serez écoutés à l’étranger… Tant pis pour moi aussi ! Tant pis surtout pour les étudiants formés à cette « modernité » destructrice et qui déjà s’initient à la musique traditionnelle en lisant des partitions, rompant ainsi avec la transmission orale. Mais tant que les villages subsisteront, vivant leur quotidien et célébrant leurs fêtes, il sera sans doute permis d’espérer un avenir pour la tradition lao.

JEUDI 25 OCTOBRE

Monuments

A 10 heures 30, je marche vers un temple voisin orné d’un beau « tympan » de couleur verte. Je tente ma chance auprès de divers tuk-tuk dans la perspective de faire la balade,  prévue hier, à Wat That Luang et Wat Sisaket : tous réclament des tarifs exorbitants, 60 000 kip ! J’en trouve finalement un avec lequel je transige à 40 000 kip, soit plus de cinq fois le prix normal ! Et nous voilà partis dans les vapeurs nauséabondes de la circulation. Nous remontons l’avenue Lane Xang, dépassons le massif Patuxai et obliquons légèrement à l’est. Au-delà d’une vaste esplanade où s’arrête le tuk-tuk, se dresse le stupa doré, brillant sous le soleil. En fait, il n’est pas recouvert d’or, mais de peinture de cette couleur. Sacré, il recélerait un cheveu du Bouddha et, les cendres de l’une de ses hanches. C’est le monument religieux le plus important du Laos. Là réside, dit-on, le chef suprême du bouddhisme laotien. Edifié au milieu du XVI° siècle, mis à mal par divers envahisseurs, il fut grossièrement restauré par les Français au début du XX° siècle. La première terrasse est ceinte de pétales de lotus. Un cloître cerne le reliquaire. Derrière, s’élève un beau fronton doré. L’enceinte abrite plusieurs monastères bouddhistes en activité. L’un d’entre eux est coiffé d’un beau toit rouge à trois pentes. Lors de la fête de ce temple, mi-novembre, des bonzes, venus de tout le pays, s’installent dans les loges qui entourent le cloître ; ils y reçoivent les offrandes des fidèles. A l’extérieur, se présentent les représentants de toutes les ethnies qui peuplent le pays et des ambassades étrangères. Une foire s’ajoute à la fête.

Brève incursion au marché de That Luang, situé dans une rue à droite de Wat That Luang. Comme dans tous les marchés d’Asie, on y trouve tout, ou presque, y compris des bijoux et diverses gargotes pour se restaurer. Le plafond est bas ; il faut souvent se baisser pour avancer. Un clair-obscur règne et l’on marche donc le plus souvent dans la pénombre.

Fronton d'un temple
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Wat That Luang
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Marché de That Luang
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Marché de That Luang
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Marché de That Luang
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Nous descendons ensuite, par l’avenue Lane Xang, vers le palais présidentiel et, à gauche, Wat Sisaket. La circulation est encombrée de conducteurs intrépides : les véhicules à deux roues se faufilent pour éviter l’obstacle, ils roulent vite, à quelques centimètres parfois de celui qui les précède. Juchés sur une moto, deux hommes et, assis à califourchon entre eux, un garçonnet : il dort. Pour la dernière fois ?

La cafétéria du centre culturel français propose un délicieux déjeuner : poulet sauté à la noix de cajou, yaourt au coco, café-truffe cardamome.

En ce début d’après-midi, je gagne Sisaket, littéralement, « le cheveu sur la tête », à pied. C’est un vieux et beau temple : il baigne dans une atmosphère de paix que ne troublent guère les quelques visiteurs. Il fut construit par le roi Anouvong en 1818, lorsque les Siamois déferlèrent sur Vientiane. De style siamois, il fut épargné. Il « possède, précise le guide, plusieurs milliers de statuettes de Bouddha, disposées généralement deux par deux dans des niches creusées dans l’enceinte du cloître ou dans le « sim » (sanctuaire central). Les plus anciennes sont en bronze et datent du XV° siècle. Les autres sont en pierre ou en argent, et datent pour la plupart des XVIII° ET XIX° siècles. »

Il poursuit : « Le « Sim », de style siamois, est entouré d’une colonnade et possède un toit à cinq pans (je n’en vois que quatre). Les murs intérieurs sont décorés de peintures très abimées qui représentent la vie du Bouddha. A l’extérieur, derrière le « sim », se trouve une gouttière en bois en forme de serpent, ou « naga », destinée à contenir l’eau lustrale servant à arroser les statues lors de la fête du Nouvel An. »

Sous le cloître, se trouve un autre « naga », plus ancien, destiné à dispenser l’eau lustrale. Dans un coin de ce cloître, on voit des Bouddha cassés, trouvés lors de fouilles, entassés derrière des barreaux de bois : des « Bouddha prisonniers ».

On admire le fronton ajouré du sanctuaire et les chapiteaux ouvragés : ils soutiennent la charpente du cloître sur laquelle reposent les tuiles. C’est un bel endroit qui offre une moisson de découvertes. Je le quitte à regret pour visiter le Wat Ho Phra Keo, que je peine à trouver alors qu’il est situé… en face de Wat Sisaket, soit à proximité du Secrétariat du Protocole et de la Présidence. Ce bâtiment des années trente est désormais un musée. Il est la « reproduction de l’ancien temple royal détruit par les Siamois en 1828. » C’était le temple du Bouddha d’Emeraude, qui se trouve aujourd’hui en Thaïlande… dans la pagode de Bangkok nommée Ho Phra Keo !

« A l’extérieur, précise le guide, le temple est entouré d’une galerie décorée de statues du Bouddha en bronze, dans différentes positions méditatives, et datant du XVIII° siècle. Derrière, dans la colonnade, au niveau de l’entrée du musée, on peut voir un Bouddha en pierre de style « dvaravati », d’origine khmère, et datant du IX° siècle. » Quelques groupes de touristes visitent les lieux.

Wat Ho Phra Keo.
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Wat Ho Phra Keo.
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Wat Ho Phra Keo.
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Wat Ho Phra Keo.
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Mekong
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Je décide de rentrer à pied ; l’hôtel n’est pas très loin, mais fatigué, je hèle un tuk-tuk : il réclame 20 000 kip, soit au moins cinq fois le prix de la course ! Certes, ce n’est pas cher pour une bourse occidentale, mais c’est agaçant d’être systématiquement pris pour un pigeon. Je poursuis donc à pied.

En fin d’après-midi, je flâne au bord du Mékong pour voir le soleil plonger dans le fleuve. Hélas ! Le ciel est nuageux et le soleil timide… Sur l’une des berges, la foire s’est installée et les tonitruantes sonorisations hurlent. Elles sont inaudibles par une oreille occidentale. Je ne sais d’où vient cet amour du bruit des Asiatiques : j’ai constaté les mêmes excès en Birmanie, à Taiwan…

En l’absence du soleil, je tente le massage au « White Lotus » de la rue Pang Kham ; c’est aussi la rue des tailleurs. Mais faute de masseurs masculins, je renonce. Grâce à l’amabilité d’un épicier de la rue, je trouve, de l’autre côté de la place Nam Phou, la nécessaire carte sim pour l’appareil de photos.

Wat Sisaket
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Naga
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Secrétariat du protocole et de la présidence.
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VENDREDI 26 OCTOBRE

VIENTIANE- LUANG-PRABANG

A 11heures15, comme prévu, le minibus de l’hôtel me conduit à l’aéroport moyennant six dollars, payés la veille en kip. Enregistrement rapide, paiement de la taxe d’aéroport (10 000 kip, soit moins d’un euro) et formalités de police pour tout le monde comme pour un vol international, scanner des bagages à main et passage sous le portique détecteur de métaux. On attend ensuite dans une salle meublée de chaises en plastique de couleur ; elle jouxte un très modeste restaurant dont les tables sont recouvertes de nappes en plastique. On songe à ces restaurants des pays de l’est tels qu’ils étaient dans les années soixante. L’embarquement commence un peu avant l’heure et l’avion décolle avec plus de dix minutes d’avance sur l’horaire. L’appareil est un bimoteur MA 60. Au cours des quarante minutes de vol, hôtesse et steward servent, à la soixantaine de passagers, eau, sandwiches et friandises. Peu avant l’atterrissage, on survole des collines verdoyantes dont la végétation semble luxuriante.

Luang Prabang est, comme l’écrira Bruno Philip, dans « Le Monde » du 25 décembre 2010, « un chef d’œuvre dont l’âme est en péril du fait même d’avoir été sauvé… » Cette ville d’ « une indicible splendeur » fut l’ancienne capitale du Lan Xang, « le royaume au million d’éléphants », du XIV° siècle jusqu’en 1946. C’est ensuite Vientiane qui accèdera à ce rang. Inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO en 1995, la cité connaît un afflux touristique sans précédent : en 2009, 230 000 touristes l’ont visité, soit dix fois plus qu’il y a vingt-cinq ans. Victimes de cette « invasion », déjà, les bonzes regagnent leur village… Un nouvel aéroport, construit par les Chinois, accueillera les avions gros-porteurs… En voie de « muséification, Luang Prabang se dépeuple, au fil des ans, de ses habitants.

Satri house

A la sortie de l’avion, il fait chaud. Le véhicule de l’hôtel m’attend. Moins d’un quart d’heure plus tard nous sommes à Satri House, vieille demeure princière, nichée dans la verdure, située à l’écart du centre- ville. La chambre est exigüe mais pittoresque. Rouge foncé, la salle de bain, agrémentée d’une baignoire ronde ne l’est pas moins. Le lit pour deux personnes est coiffé d’une moustiquaire. Les fenêtres sont protégées du soleil et de la lumière par des persiennes. Cette chambre est située, à l’étage, à l’extrémité de la maison, éloignée de la rumeur et du vacarme de la rue, face à la minuscule piscine et au beau jardin. Voilà qui est réjouissant !

Luang Prabang : Satri House, ancienne demeure princère.
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Luang Prabang : Satri House.
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Luang Prabang : Satri House
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Luang Prabang : Satri House.
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Luang Prabang : Satri House, intérieur.
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Luang Prabang : Satri House, intérieur.
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Luang Prabang : Satri House, intérieur.
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Luang Prabang : dimanche matin, tournoi de pétanque.
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Luang Prabang : dimanche matin, tournoi de pétanque.
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Luang Prabang : dimanche matin, tournoi de pétanque.
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A pied, je prends la direction du centre- ville. A peine arrivé sur l’avenue, un samlo, une sorte de side-car, ralentit à ma hauteur. Pour 5000 kip, il me dépose devant le Musée national, au pied du mont Phousi. En fait, je rebrousse chemin car j’ai aperçu des cafés et restaurants à la façade avenante. Je passe devant un temple. Dans la cour, moines et novices s’affairent à la confection d’une pirogue légère en bambou et papier qui voguera demain et périra dans les eaux du Mékong. Je me restaure dans un café-pâtisserie.

Phousi

Aux alentours de 15 heures 30, je commence l’ascension du mont Phousi. L’entrée coûte 20000 kip, soit moins de deux euros. Il faut gravir 328 marches, espacées les unes des autres, à l’ombre d’une végétation fournie qui rend l’effort moins pénible. « Au sommet, dit le guide, au milieu d’un maigre chaos de rocs, s’élève le That Wat Chomsi, stupa de vingt mètres de hauteur surmonté d’une flèche dorée que l’on aperçoit de loin. A mi-chemin, une terrasse plantée d’un banian : il incarne l’arbre de l’illumination du Bouddha.»

Arrivé au sommet -il culmine à environ quatre-vingt mètres- le panorama est magnifique. Du côté de la Nam Kane, à l’est- nord- est, s’allongent une longue avenue et une étendue verdoyante, fermée au loin par une chaîne de montagnes, sur laquelle resplendit l’or du Wat Pa Phone Phao (temple de la méditation). Au sud, on voit quelques temples tout proches, et, au pied de la colline, les eaux boueuses du Mékong, sur lesquelles voguent quelques rares pirogues, et, à l’horizon, nimbées d’une légère nébulosité, cinq ou six chaînes de montagnes qui s’étagent comme les toits des temples. Cerné par ces montagnes et les deux fleuves, je songe au breton Auguste Pavie (1847-1925) découvrant autrefois ce panorama grandiose, vierge alors de toute trace de modernité. Peut-être pensa-t-il qu’à la beauté du paysage, il faudrait ajouter « le progrès » ?

Luang Prabang - Préparation de la fête.
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Luang Prabang
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Offrandes sur le chemin du mont Phousi.
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Au sommet du mont Phousi.
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Au sommet du mont Phousi.
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Au sommet du mont Phousi.
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Au sommet du mont Phousi.
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Marché de nuit, à Luang Prabang.
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Peu à peu, les touristes arrivent pour admirer le coucher du soleil qui fait saigner le ciel et l’eau avant de sombrer derrière les montagnes… Des monastères des environs monte l’écho des chants et des gongs. Le temps s’écoule et le soleil lentement poursuit sa ronde et descend vers les cimes tandis que son éclat illumine encore le fleuve, métamorphose ensuite ses eaux en or et, enfin, en sang, avant de s’engloutir au loin dans les nuées. Il est dix-sept heures trente, une douce lumière demeure qui baigne ce paysage majestueux. Impatients, certains visiteurs n’attendront pas que se déroule et s’achève ce cycle immuable de la lumière finissante et des ténèbres naissantes. La plupart des touristes a déserté les lieux. Malgré la rumeur de la circulation, la contemplation est paisible, en compagnie de quelques Laotiens. Dans la pénombre, je redescends vers la ville et son tohu-bohu. Les toiles rouges des étals d’un marché de nuit flamboient le long d’une avenue. C’est le soir. Un tuk-tuk me conduit jusqu’à l’hôtel pour … 5000 kip : je n’ai pas discuté le tarif et le chauffeur ne cache pas sa joie !

C’est la fin du carême bouddhiste. Le soir, la pleine lune s’épanouit ; pétards et feux d’artifices retentissent. A 20 heures 30, je marche le long de la rive du Mékong, en quête du « Café des Arts ». Restaurants et cafés en plein air résonnent de l’allégresse des chalands. Quelques pirogues éphémères flottent déjà sur les eaux. Je questionne les uns et les autres, qui ne comprennent ni un mot de français ni un mot d’anglais, ainsi que les chauffeurs de tuk-tuk. Ceux-ci ne savent rien si ce n’est répéter à l’envi « tuk-tuk, tuk-tuk… » et afficher leur tarif avec leurs doigts ou leur téléphone portable… Bredouille, je rebrousse chemin et emprunte une voie parallèle. La rue est dépourvue d’éclairage public. Une puanteur assaille les narines : pourquoi évoque-t-on toujours les parfums de l’orient et jamais ses odeurs pestilentielles ? De retour à Satri House contrarié et énervé, je m’adresse au gardien de nuit, qui ne comprend rien à ma colère. Il me conduit vers une maison voisine où dînent une laotienne et un jeune laotien. A l’instigation de la dame, le jeune-homme enfourche sa moto et me conduit aimablement jusqu’au restaurant. Sur la route, une moto est accidentée, une personne git sur le trottoir… On ne s’arrête guère.

Au « Café des Arts », le dîner est très quelconque, l’addition beaucoup plus élevée qu’à Vientiane, et la musique diffusée exécrable. Les guides ne sont pas toujours fiables. Par ailleurs, en cette période de festivités, qui résonne de pétarades diurnes et nocturnes, ne devraient-ils pas déconseiller le voyage en Asie aux oreilles sensibles ?

SAMEDI 27 OCTOBRE

LUANG PRABANG

A 7 heures 45, le ciel est gris ; il fait frisquet.

Apprentissage

A 9 heures, audition des professeurs du « Centre culturel lao pour les enfants » : ce centre est ouvert depuis janvier 1998 et œuvre pour la culture, l’information et l’éducation. Il est soutenu par diverses organisations internationales. Il met en œuvre des programmes d’activités pour les enfants, disponibles après l’école et pendant le week-end, en matière d’apprentissage des traditions lao, de santé et d’environnement : « A travers leur participation à la musique traditionnelle, au théâtre, au conte, au chant et à diverses activités artistiques et artisanales, les enfants et les jeunes lao développent des capacités pour vivre qui favorisent des styles de vie sains, une bonne entraide et une connaissance culturelle », précise un document en langue anglaise.

Neuf jeunes musiciens et musiciennes, âgés de dix-sept à vingt-neuf ans jouent à mon intention : cymbales, cymbalettes, violons saw u, saw kang, saw i, flûte hui, cithare kim, tambour biface et xylophone ranat. Ils interprètent à mon intention six pièces du répertoire : une version instrumentale de la « chanson de la lune », populaire dans l’ensemble du pays, de « khapthoum », un chant d’amour courtois, traditionnel de Luang Prabang et de « duang champa », la fleur du frangipanier, qu’au Laos chacun connaît. Suivent trois chants, versions vocales de « duang champa », « khapthoum » et d’une évocation de Luang Prabang, qu’interprète la belle voix de l’un des musiciens. « Ce n’est qu’un au revoir » marquera le point final de la prestation.

Conversation avec les musiciens :

Tous sont originaires de Luang Prabang où l’on écoute beaucoup les chanteurs laotiens d’autrefois. Ils ont appris la musique par l’écoute et l’imitation et avec quelques professeurs de la région ; ils savent lire la musique. Ils offrent une représentation, le soir, deux fois par semaine. Ils ont joué aussi devant des publics jeunes et adultes au Japon et en Thaïlande. Parfois, ils se produisent dans les restaurants. Ils aiment écouter la musique traditionnelle vietnamienne, les variétés lao, le rock américain, la salsa, le disco. En fait, comme tous les jeunes du monde, ils affichent des goûts musicaux éclectiques. Mais, ici, disent-ils, à partir de vingt ans, on écoute beaucoup la variété thaïe ; plus jeune le rap et le hip hop thaïs. Ils prodiguent leur enseignement musical aux enfants à partir de l’âge de douze-treize ans : le xylophone ranat et le tambour essentiellement.

Un déjeuner rapide au « Ancient Louang Prabang hotel » me laisse le souvenir de délicieux yaourts à l’ancienne, qui ont le goût de ceux de mon enfance, et des jolis teeshirts verts des garçons …

Je rentre dans une échoppe pour demander mon chemin : un garçon me propose de me conduire en moto, moyennant 10 000 kip (soit moins d’un euro) pour payer son essence. Allons-y donc …

Temples

Comme tous les autres temples, le Wat Visoun est en fête. Son voisin, le Wat Aham aussi : une pirogue faîte de lattes de bambou et de papier attend sa mise à l’eau. Autour du Wat Visoun, divers stands proposent cartes postales anciennes et actuelles ainsi que des objets d’artisanat. Pour l’heure, il y a peu de monde. Des hauts -parleurs diffusent en continu un épisode de la vie de Bouddha. Ce temple est le plus ancien de la cité : édifié au XVI° siècle, il fût reconstruit à la fin du XIX°. Ses fenêtres à balustres en bois sont inspirées du temple khmer de Wat Phou, situé au sud du Laos. Le Wat Visoun abritait le Bouddha d’or, le « Prabang », icône sacrée. A ses pieds, des fidèles vêtus de blanc se recueillaient. Dans la même enceinte, s’élève un stupa de pierre en forme de pastèque, le That Mak Mo.

Soie

Je flâne un long moment en ces lieux où l’on prépare les festivités du soir tandis que les enfants jouent. Sur les conseils d’une amie, je m’engage dans une venelle en cours de restauration et visite Ban Vongmai. C’est une maison où l’on élève des vers à soie. On y prépare aussi la teinture d’indigo naturelle (les feuilles fermentent pendant trois jours : l’odorat peut en témoigner !). Là, on tisse la soie : on peut admirer et acheter nombre de belles soieries, ainsi que des objets en papier de murier. Le processus se déroule ainsi : pendant un mois, les vers à soie boulotent des morceaux de feuilles de murier puis, ils tissent un cocon qui sera ensuite dévidé et purifié de ses impuretés. Le fil issu de la face extérieure du cocon, celui de l’intérieur et celui du cœur du cocon seront ensuite tissés en autant de variétés de soie de qualités différentes. D’autres familles du quartier, qui élèvent des vers à soie, fournissent aussi cette entreprise : conformément à la tradition, elle tisse sur des métiers à l’ancienne. Empruntés à la nature, les motifs décoratifs les plus courants sont le serpent naga, l’éléphant, l’oiseau… Les uns symboles de fertilité, les autres symboles hindou-bouddhistes. Cette maison, par ailleurs, afin de transmettre cette tradition, enseigne le tissage.

Je quitte ensuite cette venelle et me dirige vers la droite : une théorie de maisons anciennes –restaurées ou non – m’attire dans cette direction. Toutes privilégient le bois ; certaines sont dotées d’un ou plusieurs pans en fibres végétales, d’autres d’une claire -voie qui permet le passage de l’air. Il en est une couverte de chaume. Au passage, rue Phousi, je découvre « L’Etranger, Book and Tea », ses rayonnages de livres, son bois sombre et sa terrasse, le « Hi-ve bar », fermé à cette heure, ainsi qu’un autre joli petit bar, situé dans un écrin naturel, où des garçons à la masculinité discrète préparent avec grâce des offrandes pour la fête nocturne de la lumière.

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Architecture coloniale
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Wat Aham. Pirogues en papier.
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Ban Vongmai, tissage de la soie.
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Vers à soie.
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Au fond, le That Mak Mo
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Maisons anciennes
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Maisons anciennes
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Rivière Nam Kane
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Préparation de la fête.
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Wat Siphoutthabat Thippharam
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Panorama

Je poursuis mon chemin jusqu’à la rivière Nam Kane ; là, on jouit d’un panorama magnifique : à gauche la colline Phousi, à droite, la rivière et, dans le lointain, les chaînes de montagnes voilées d’une légère nébulosité. Je demeure face à la rivière : à main droite, sur une excroissance de la berge, se dressent une maison, faîte de fibres végétales, et une douzaine de huttes, alignées sur deux rangées et construites avec ce même matériau. A proximité, un homme cultive un lopin de terre. Au-dessus de la rivière, un panache de fumée s’inscrit dans le ciel bleu. Sur l’eau, à bord d’une pirogue de bois, un homme pêche. Ici, tout n’est que pauvreté, calme et travail. Sur l’autre rive, à main gauche, prospère une végétation luxuriante ; sur la terre de la berge fécondée par les limons, et, à flanc de coteau, sur ses pentes, un paysan, dont on aperçoit la maison sur pilotis, cultive des primeurs. Sur la même rive, un peu plus à gauche, quelques pirogues pêchent et, un peu plus loin, à bord d’autres embarcations, des enfants jouent à s’éclabousser… Images de l’homme au travail et d’un quotidien laborieux et paisible, au cœur de cette nature grandiose et exubérante, à l’écart du tohu-bohu de la ville, de ses motos et de ses tuk-tuk pétaradants. Un jeune couple s’est arrêté et, assis sur sa moto, contemple ce paysage bucolique, aux portes de la cité, en grignotant des cacahuètes.

Moyens de transport !
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Moyens de transport !
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Moyens de transport !
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Moyens de transport !
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Moyens de transport !
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Moyens de transport !
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Moyens de transport !
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Temple

Je continue pour rejoindre Sisavang Vong road et rentrer car, à cette heure, la chaleur est encore accablante et je suis fatigué. Mais, au détour de Phousi road et de la courte rue qui la relie à Sisavang Vong, je découvre un temple que le guide ignore : Wat Siphoutthabat Thippharam. A l’entrée, figure le traditionnel panneau qui informe du concours pour la rénovation, dans le cadre de l’inscription de la ville au patrimoine mondial de l’UNESCO, sous l’égide des autorités lao :

« République Démocratique et Populaire Lao, Paix, Indépendance, Démocratie, Unité, Prospérité… »

Le premier édifice est coiffé d’un toit à trois pentes gigognes ; l’auvent est soutenu par des colonnes qui se terminent par un chapiteau ouvragé ; elles sont peintes de motifs ocre et or qui dessinent une mosaïque. Sur le côté, une porte en bois ancienne conserve quelques traces éparses de dorures. Plus loin, à l’ombre des grands arbres, le second édifice est couvert d’un toit qui s’étage également en trois pentes. L’auvent repose sur des colonnes rouge et or. A proximité, deux jeunes-filles coupent trois grandes feuilles de bananier : pour les offrandes ou pour la cuisine ? Pour le ciel ou pour la terre ?

Je gravis quelques marches sur la gauche, en direction des pénates de moines. Sous le toit d’une sorte de grand kiosque où, me dit l’un d’entre eux, ils prennent leurs repas, trois robes safran virevoltent en briquant le plancher de bois. Pour ce faire, ils ont chaussé un de leurs pieds d’une demie- noix de coco, la partie bombée attachée à la voûte plantaire, la partie coupée grattant le parquet. Une vieille technique qui, depuis des siècles sans doute, a fait ses preuves !

En fin d’après-midi, à pied, je me hâte vers le magasin Kodak pour récupérer mes nouvelles piles rechargeables… rechargées. Déjà, au carrefour proche de Satri House, le défilé des pirogues de lumière commence à se former dans le désordre et le bruit d’une circulation anarchique.

Défilé

De retour de la boutique, je remonte le défilé, qui s’apprête à s’ébranler, en photographiant chacune de la vingtaine de pirogues de lumière et les cortèges qui les accompagnent : enfants portant bougies et flambeaux, certains vêtus de riches costumes et maquillés comme pour une entrée en scène, lycéens et lycéennes en uniformes noir et blanc (sarong noir et blanc pour les filles), citoyens appartenant à diverses minorités (Hmongs tout de noir vêtus, certains escortés d’un groupe de jeunes portant tee-shirt bleu, suivis de ceux qui arborent un teeshirt rouge –les couleurs du pays ?-), garçons joliment travestis –dont l’un en femme- représentants des guest- houses, habitants d’un quartier… La plupart de ces groupes sont accompagnés de quelques musiciens qui frappent des percussions : tambours et tambours à long fût, gongs et cymbales. Un acrobate, le corps tatoué, divertit les badauds. Mais je ne vois guère les bonzes ni les pirogues confectionnées dans les temples.

Aux alentours de dix-neuf heures, la nuit enveloppe la cité. La lune ronde et or est accrochée à la flèche dorée du That Wat Chomsi, au sommet du mont Phousi, comme le symbole céleste de cette fête de la lumière. Le défilé s’ébranle. Massée sur les trottoirs, ornés de multiples bougies et de petites pirogues lumineuses, la foule, familiale et bon enfant, s’emplit les yeux de ce spectacle incomparable : une longue théorie de pirogues illuminées et son charivari de musiques, de chants et de cris d’allégresse mêlés. Cette foule, en effet, manifeste aussi sa joie, par la parole, le cri et les explosions répétées de centaines de feux d’artifices, lancés en l’air ou bien sur la chaussée, et de pétards assourdissants, jetés dans les jambes ou à l’oreille des gens, au mépris de toute prudence. Des nuées d’enfants, plus beaux et plus gracieux les uns que les autres, se réjouissent. On s’inquiète pour les oreilles des bébés, blottis dans les bras de leur mère ! Les touristes sont nombreux qui admirent le spectacle et pour la plupart raisonnables.

Après le passage du défilé, des myriades de motos, de vélos puis, de tuk-tuk envahissent la chaussée, tandis que l’on dépose sur les eaux du Mékong flambeaux lumineux et pirogues illuminées, portés et charriés par le flux du fleuve. Quelques pirogues et autres embarcations, chargées de passagers en goguette, sont coiffées de pirogues dessinées par l’électricité. Debout sur l’une des berges, je contemple le fleuve mais un peu las, je pars à la recherche du bar « Le Lemongrass », censé se trouver à deux pas. Je ne le trouve pas et, bien sûr, personne ne comprend, personne ne connaît, pas même la dame du salon de massage dont l’enseigne porte le même nom… Le Lao est indolent, le Lao s’en fout ! Epuisé par la marche, le visiteur regagne ses pénates.

Défilé de la fête de la Lumière
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DIMANCHE 28 OCTOBRE

LUANG- PRABANG

Jusqu’à midi, l’électricité est coupée ; un comble dans ce pays exportateur d’énergie !

Comme chaque matin, le ciel est terne. Il n’est pas encore huit heures trente ; l’azur apparaît sur le coup de onze heures. Un peu plus tard, aux alentours de quinze heures, quinze heures trente, on subit la chaleur ; une forte chaleur, même si les autochtones ont une sensation de fraîcheur. Tout est relatif.

C’est dimanche et, à proximité de la résidence, on perçoit les éclats d’un tournoi de pétanque. Les Laotiens pratiquent ce jeu avec sérieux et fougue : rien à envier aux adeptes marseillais de ce jeu…

A 13 heures, je gagne le « Souvannaphoum » voisin, ancienne demeure princière rénovée et transformée en hôtel de luxe. Sobre et claire, la salle à manger ouvre sur la piscine et le jardin. Les chambres se répartissent au fil de deux étages, de la rue au jardin, certaines nanties d’un balcon. Le cadre est agréable, la nourriture bonne ; les prix demeurent abordables : on déguste un kai phad king (poulet, légumes et gingembre) malheureusement excessivement poivré, un gâteau de riz à la mangue, un soda et du thé pour douze dollars. Une fois encore, je constate que les serveurs, comme tant d’autres en ce pays, ne comprennent pas grand- chose à ce qu’on leur dit, même en anglais.

Palais royal

Au terme de ce déjeuner, visite de l’ancien palais royal, construit en 1904, devenu musée national en 1976. La première salle, la salle du protocole, recèle, à l’abri de vitrines, une belle collection de Bouddha anciens des XV° et XVI° siècles. On y trouve aussi le siège du chef religieux de l’ancien royaume, affirmation de la suprématie de la religion. La pièce suivante, salle de réception du roi, est décorée de peintures art déco, réalisées dans les années trente par Alix de Fautereau : « scènes colorées de la vie villageoise laotienne aux différentes heures de la journée. » Dans le couloir, on découvre d’imposants tambours de bronze anciens (XI° et XV° siècles), décorés d’un soleil en leur centre et de grenouilles sur le pourtour de la face supérieure. Celles-ci sont le symbole de la mousson ; associées au soleil, ainsi qu’à d’autres éléments de la nature, elles symbolisent fertilité et prospérité. Autrefois, ces tambours étaient suspendus à une pièce de bois et portés à l’épaule par deux hommes dont l’un jouait.

La salle du trône a été décorée, en 1960, de mosaïques de verre colorées du Japon évoquant l’Histoire et la vie quotidienne du pays. Le trône comme tous les trônes est imposant… On admire une jolie collection de petits Bouddha en cristal de roche des XV° et XVI° siècles, trouvés à l’intérieur du That Mak Mo (le temple de la pastèque). On découvre également des Bouddha anciens en bronze et, surtout, sous la protection d’une vitrine, de précieux Bouddha faits d’un alliage d’or et d’argent. Enfin, on s’extasie devant un élégant petit Bouddha couché en bois doré.

On visite ensuite la bibliothèque du roi : une table de salon, quatre chaises hautes et plusieurs armoires vitrées ainsi qu’un présentoir doré, offert par l’Inde : il recèle une collection de jataka qui racontent des épisodes de la vie de Bouddha. Que lisait le monarque ? En 1952, Paris Match (numéro du couronnement d’Elizabeth II ; légion d’honneur attribuée à Jean-Yves Le Toumelin, navigateur). Peut-être étudiait-il, en édition de classiques scolaires, « Bérénice » de Racine et « Les lettres persanes » de Montesquieu, ainsi que « Hemingway par lui-même ». Lisait-il la collection des archives administratives et politiques de la cour des Ming et de la cour des Qing offertes par la Chine ? Se plongeait-il dans la riche collection des contes populaires lao ? Sans doute aimait-il l’Histoire ; divers ouvrages relatifs à cette discipline figurent dans sa bibliothèque et plaident en ce sens : entre autres, une « Histoire des trois royaumes de l’Indochine », œuvre de H.J. Coolidge jr. et Theodore Roosevelt, ainsi que « La vie des hommes illustres » de Plutarque. Par ailleurs, les volumes de « A la recherche du temps perdu » de Proust s’alignent sur l’une des étagères. En-dessous, « Correspondance » de Stendhal, les « Romans » de Marivaux, les « Poèmes » de Lamartine, œuvres de Zola et Voltaire, tous dans l’édition de La Pléiade. Mais on découvre aussi Alain Decaux et « Un siècle d’humour français ». Le souverain manifestait, semble-t-il, les goûts d’un citoyen moyen.

Dans les couloirs, sont exposés sceaux royaux, billets de banque anciens et vêtements de la dernière reine du Laos. Les chambres à coucher de la reine et du roi surprennent par leur dépouillement : peu de meubles, rien au mur, rien au sol ; aucun apparat, le strict nécessaire. La salle à manger n’est guère plus avenante : une table au centre, six chaises autour, plus deux, deux dessertes, point de décoration. Dans l’une des deux vitrines est entreposé un service en porcelaine de Sèvres. Dans l’un des couloirs, on découvre une potiche issue de la même manufacture et, dans une autre vitrine, un autre service en porcelaine de Limoges à liseré doré et flèche dorée du palais, peinte sur le bord haut de l’assiette, des verres en cristal de Bohème, des couverts en argent et, des boîtes à bétel. Plus loin, on admire une collection de masques du Ramayana, l’épopée indienne qui s’est inscrite dans diverses cultures du sud-est asiatique, et quelques instruments de musique : tambours, xylophone ranat et deux tambours khong vong. La salle de réception de la reine recèle les tableaux de famille. Celle du Secrétaire du roi rassemble les cadeaux des chefs d’Etat et gouvernements étrangers : somptueuse argenterie cambodgienne et birmane, élégante parure de bureau thaï, porcelaine japonaise, porcelaine de Sèvres, offerte par le général et madame de Gaulle…

Le « Prabang » est cette précieuse statuette d’or du Bouddha : elle mesure quatre-vingt- trois centimètres de hauteur et pèse cinquante kilogrammes. Très ancienne, elle est entourée de tambours de bronze (tambours de guerre et tambours de pluie), de défenses d’éléphants sculptés et de paravents qui furent brodés par la reine. Convoitée, on la contemple à l’abri d’une grille ; les mauvaises langues prétendent que c’est une copie…

Au terme de cette visite, on constate que ce petit palais, édifié de plain-pied, n’appartient à aucun style, n’offre même aucun charme. Ses planchers de bois sombre, ses murs, pour la plupart nus, et ses décors, chargés quand ils existent, ne suscitent guère le rêve. Son dépouillement excessif, à l’exception de la salle du trône, et ses longs couloirs ternes laissent présager en ces lieux une existence morne, brisée à l’occasion, par l’apparat d’une cérémonie officielle. A droite, en sortant, se trouve le théâtre Phra-lak Phra-lam où se déroulent des représentations du Ramayana.

Le soir, au restaurant « Indochina Spirit », un trio (xylophone ranat, tambour et cymbalettes) divertit les convives : un répertoire des diverses provinces du pays, une musique douce et un tantinet répétitive. Le poulet aux herbes, cuit à la vapeur dans une feuille de bananier, est savoureux.

Luang Prabang
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Luang Prabang
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Restaurant Indochina Spirit
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LUNDI 29 OCTOBRE

LUANG-PRABANG

Ce matin, le ciel boude jusqu’à onze heures.

Histoire à raconter à certains jeunes Français 

A l’heure du déjeuner, rencontre avec Keo, vingt ans, étudiant et serveur. Originaire d’une province éloignée, située à environ 300 kilomètres, au nord de Luang-Prabang, il est orphelin de père depuis dix ans. Il vit, à l’orée de la ville, dans une grande pièce qu’il partage avec trois amis, pour quatre-vingt- dix dollars par an et par personne. Etudiant en anglais, il assiste au cours l’après-midi (on suit les cours ou le matin ou l’après-midi) et travaille comme serveur, chaque jour, de six à quatorze heures, le samedi, seize heures d’affilée… Le dimanche, il se repose. Il gagne pour prix de son labeur… trente dollars par mois ! Certes le coût de la vie est inférieur au Laos à celui qui prévaut en France mais, c’est tout de même peu ; insuffisant, par exemple, pour acquérir les livres nécessaires à l’étude. Mais Keo ne se plaint pas.

Paysage

Il me conduit en moto au proche Boua Kang Bung (« la fleur sur l’étang »). En fait, c’est plutôt une vaste et ronde mare, bordée de hauts cocotiers dont les palmes se reflètent dans le miroir de l’eau. Quelques bananiers prolifèrent également autour de « l’étang » ; sa surface s’orne de lotus dont la floraison n’est pas encore advenue. On le sait, les feuilles de bananier sont utiles : elles servent à envelopper les produits achetés au marché, à cuire les aliments à la vapeur et à bien d’autres choses encore…

À Boua Kang Bung ("La fleur sur l'étang")
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À Boua Kang Bung ("La fleur sur l'étang")
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À Boua Kang Bung ("La fleur sur l'étang")
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À Boua Kang Bung ("La fleur sur l'étang")
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Depuis midi, on subit une chaleur accablante. Assis à la terrasse du restaurant, construit en bois, nous buvons un verre et admirons ce paysage paisible et beau, loin des bruits de la ville. Il appartient à une zone humide protégée, intégrée dans « la coulée verte » de la cité, un réseau de mares naturelles ou creusées par l’homme qui y élève des poissons et y fait pousser des plantes. Ce réseau joue un rôle important : rétention des eaux lors d’inondations, préservation des paysages ainsi que de la flore et de la faune, intérêt économique. Une foule de petits poissons fait des bulles à la surface de l’eau ; ils montrent leur gueule comme s’ils posaient pour le photographe… Tables et petits hauts -parleurs –ils diffusent des standards américains- ont déjà envahi deux des rives de cet étang, ce qui n’est ni naturel ni écologique ! Un deuxième étang est bordé de maisons sur pilotis.

Temples

Nous prenons, ensuite, la direction du centre, le long de Sisavang Vong, en allant vers le nord, pour visiter le Wat Sene Soukharam, un temple du XVIII° siècle, coiffé d’un toit à trois pans et, dont l’entrée est gardée par deux tigres en pierre. Construit « avec 100 000 pierres du Mékong », il fut rénové dans le style thaï. Sous le toit d’une « chapelle » latérale, un Bouddha « moderne » de huit mètres de haut remplace une statue ancienne. A ses pieds, on a déposé des offrandes. A l’abri d’un hangar, sont entreposées deux longues pirogues de course, décorées au pochoir, susceptibles d’accueillir chacune une cinquantaine de rameurs.

A côté, resplendit un autre temple, de proportions plus modestes mais, nanti d’une façade or, le Wat Soap Soukharam, dont le toit compte deux pans et un « bouquet de sept fleurs du ciel » ; ce dernier témoigne du degré d’importance du temple et de ses donateurs. Un peu plus loin, se trouve l’école des novices : c’est à ce moment-la, un cours de physique qui est prodigué ; outre l’enseignement religieux, les moines suivent, dans leur monastère, un cursus normal dispensé, en ce pays communiste, par des professeurs laïcs, fonctionnaires de l’Etat. A proximité, s’alignent les logements des moines, comme il en existe, me dit-on, dans chaque temple. A même le sol, s’abîment cinq grands plats de riz, l’excédent de la collecte de nourriture de la matinée.

Nous poursuivons à pied vers Wat Siboun Heuang. C’est le nom du village. Luang Prabang est constitué d’un ensemble de villages, chacun doté d’un temple. Ici, pour la fête, les moines ont confectionné un gros oiseau, on dirait un paon, et un avion, accroché à un arbre. Nous sommes à la lisière de la ville qui, en ces lieux, affecte un air de campagne. La rue Sakarine ne manque pas de cachet : elle aligne une longue théorie de maisons d’un étage, agrémentées d’une galerie, de style colonial-lao. Ce quartier, si j’en crois l’interprète, aurait été édifié par les Français.

En face de nous, de l’autre côté de la rue, on aperçoit le Wat Souvannakhiri, une « maison », issue de l’architecture coloniale, dont le faîte est celui d’un temple. A côté, s’élève un sanctuaire plus conforme à la tradition. Un moine en balaie la cour ; c’est au sein des temples une activité quotidienne.

Nous empruntons une ruelle pour descendre vers la rivière Nam Kane : on y admire de jolies maisons sur pilotis nichées dans la verdure ; l’une, dit-on, est l’œuvre du consul d’Allemagne à Bangkok. Derrière la mince palissade de l’une d’entre elles, autour d’une table dressée à l’ombre des arbres, quatre amis ripaillent et font couler la bière…

Sur la rivière, un piroguier pêche au filet. Là-bas, sur l’autre rive, un modeste temple émerge de la verdure et, l’on devine, à l’abri de la végétation verdoyante, une maison édifiée en fibres végétales. A nos pieds, des champs de maïs encore vert s’étendent sur la terre fertile.

Sur le trottoir, une planche rectangulaire est posée debout : elle est constellée de petites galettes de riz de forme ronde qui sèchent au soleil, dans les miasmes de la circulation. On les cuira ensuite au four.

On remonte en empruntant le même chemin et l’on visite, à côté du Wat Xieng Thong, envahi par un groupe de touristes thaï, un bel et ancien petit temple, le Wat Pakhan. A l’intérieur, plongé dans une pénombre propice au recueillement, on devine une statue du Bouddha et deux rangées de robustes colonnes de couleur rouge. Les bâtiments alentour, qui bordent la cour, dégagent un même charme. Ici, un moine balaie les feuilles mortes…

On jette un coup d’œil à la superbe « maison du patrimoine », sans doute une ancienne demeure coloniale, et on enfourche à nouveau la moto pour rebrousser chemin par cette belle rue Sakarine, qui se prolonge en Sisavang Vong jusqu’au palais royal-musée.

Wat Siboun Heuang
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Wat Siboun Heuang
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Bouquet de sept "fleurs du ciel".
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Reliefs de la collecte de nourritures des moines.
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Novices pendant la pause.
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Wat Souvannakhiri
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Modeste sanctuaire
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Galettes de riz, séchant au soleil
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Wat Pakhan
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Ramayana

Là, en cette fin d’après-midi, au théâtre Phra-Lak Phra-Lam, un professeur de danse et de musique accepte d’accorder un bref entretien avant la représentation. Il a, dit-il, commencé sa carrière en 1957 et jouait alors un rôle de « géant ». Il semble qu’il soit difficile de le faire parler de sa pratique. On apprendra donc seulement qu’il n’existe guère de partitions (« pas de livres », dit-il) de cette musique qui « accompagne » les danses du Ramayana, l’épopée indienne présente en ce pays depuis le XVI° siècle. L’apprentissage, dira-t-il encore, se fait plus ou moins par la transmission de père en fils, le fils imitant et répétant ce que fait le père. Actuellement, on peut constater, et le spectacle l’attestera, que de jeunes musiciens et de jeunes danseurs ont été formés. Les instruments de l’orchestre, précise notre interlocuteur, fonctionnent par paires qui associent timbres aigu et grave. Mais, cela, on le savait déjà !

La salle, de dimensions modestes, comme le plateau, éclairé par quelques projecteurs, compte environ 150 places. Keo, le jeune étudiant me rejoint : c’est la première fois de sa vie qu’il assiste à ce spectacle. Le prix des places, accessible au visiteur étranger (le billet le plus cher coûte 100 000 kip), est trop élevé pour la plupart des Laotiens qui, faute de moyens, délaissent cette tradition. Au nouvel an, ils se contentent de regarder, à partir de la rue, la représentation en plein air… Cet après-midi, le public est exclusivement composé de touristes étrangers. Au bas de l’escalier qui permet l’accès à la salle, c’est le professeur avec lequel je me suis entretenu qui contrôle les billets. Ce théâtre artisanal conserve, semble-t-il, un statut indépendant : les artistes ne sont pas fonctionnaires.

 

ORCHESTRE DU PHRA-LAK PHRA-LAM :

Dix musiciens (jeunes et vieux), disposés sur le côté droit (à cour) de la scène.

- violon saw                                                            - tambour ­vong

                      – xylophone ranat                                                  - flûte hui

                             – violon saw

                     - 2 gros tambours kong      - tambour kong        - cymbalettes

- xylophone ranat                                                   - tambour vong

                                                                                                        - violon saw

- voix (narration chantée)

1 homme/ 1femme

Il semble que ce soit les deux gros kong et les xylophones ranat qui conduisent la musique.

Théâtre Phra-Lak Phra-Lam
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Théâtre Phra-Lak Phra-Lam
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Théâtre Phra-Lak Phra-Lam
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Théâtre Phra-Lak Phra-Lam
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Le programme offre six pièces, présentées en anglais et en français, ce qui apparaît quelque peu inutile. Le spectacle commence par la cérémonie de Baci et, se poursuit avec une pièce instrumentale et une danse de bienvenue : vêtues d’une tenue traditionnelle de couleur bordeaux et d’étoles de différentes couleurs, sept danseuses l’exécutent. Un épisode du Ramayana est ensuite présenté : deux masques verts et un blanc évoluent. Puis, deux rangées de six jeunes filles et trois autres protagonistes dansent. Suit la danse des singes : deux rangées de quatre garçons, ainsi que deux autres, portant masques et queues de singe. Six garçons s’alignent par trois, plus un, pour la danse des géants : ils sont affublés de masques blancs grimaçant. Au terme de ces cinq séquences, on constate que les costumes n’offrent ni le raffinement ni l’éclat de ceux  du khon thaï. Il semble qu’ils soient confectionnés à partir d’étoffes « bon marché ». Par ailleurs, on doute qu’ils soient cousus à même le corps des artistes comme en Thaïlande. Les mouvements du corps et les gestes des bras et des mains apparaissent moins gracieux. L’ensemble du programme laisse une impression mitigée ; « c’est assez amateur », dira un diplomate français. Pourtant, la dernière pièce, Nang Keow, un ballet du XIV° siècle, témoigne de l’aptitude des artistes à la perfection. Vêtues d’élégants costumes, dont le dos est constellé, dix-huit jeunes-filles, alignées en trois rangées, offrent une magnifique danse, empreinte de délicatesse, de grâce et de raffinement. Les arabesques dessinées par les bras et les mains attestent une grande finesse.

 

MARDI 30 OCTOBRE

LUANG PRABANG

Le ciel est terne comme d’ordinaire et, le bruit redondant : éclats de voix chez les voisins, stridences d’une scie électrique, échos brouillés d’un poste de radio, vacarme de la circulation, avion d’Air Lao volant à basse altitude…

Chef-d’œuvre

En début d’après-midi, on visite le Wat Xieng Thong, c’est, à mon avis, le plus beau ! Il offre lignes pures et proportions harmonieuses. Construit au XVI° siècle, il était placé sous la protection de la monarchie. Sa cour s’ouvre sur le Mékong. Ce sanctuaire est caractéristique de l’architecture de la cité : ses pans de toit descendent presque jusqu’au sol. Sur la façade arrière, une superbe mosaïque, faîte d’une multitude d’éclats de verre multicolores, représente « un arbre de vie », dit mon accompagnatrice, « l’arbre de l’illumination », écrit le guide. Le toit est coiffé d’un « bouquet de fleurs du ciel » de dix-sept flèches (le nombre en est toujours impair) qui atteste son importance. Seul le toit qui abrite le «  Prabang », au Palais royal, en compte davantage. L’édifice principal, la chapelle du Bouddha Sacré, recèle ce Bouddha que l’on sort chaque année, à l’occasion du nouvel an. Depuis 1957, l’une des chapelles est décorée de mosaïque de verre d’inspiration japonaise. A droite de l’entrée, côté rue, un pavillon abrite l’imposant char funéraire doré, monté sur pneus, du roi Sisavang Vong, sculpté de têtes de naga (« dragons », écrit le guide).

Wat Xieng Thong
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Wat Xieng Thong - Char funéraire
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Wat Xieng Thong - 17 "fleurs du ciel"
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Desproges

Bref arrêt à la Villa Santi, sans doute une ancienne demeure coloniale transformée en hôtel. On observe ensuite la longue école primaire et ses préaux qui date, elle aussi, du protectorat ; c’est la récréation : les petits portent déjà l’uniforme. Plus loin, au cœur d’une ruelle, la Villa Desproges : le père de Pierre fut ici instituteur et directeur d’école. Pierre y a-t-il vécu ? Cette belle maison, au terme des travaux en cours, accueillera, à partir de la mi-novembre prochaine, le centre de langue française. Juste retour des choses ? De l’autre côté de la rue, perpendiculaire au Mékong, on découvre un joli temple dont la façade est couverte d’or, le Wat Paphaimisaiyaram.

La rue Xieng Mouane est en fait une ruelle perpendiculaire à la rue Sisavang Vong. Elle se prolonge jusqu’au temple Xieng Mouane. A l’entrée de cette ruelle, s’élève sur pilotis une maison traditionnelle en bois, la Maison Phouang Champa. C’est une sorte de centre culturel privé, financé, dit-on, par des fonds privés, collectés au sein de la diaspora lao, en particulier aux Etats-Unis. On y organise des stages des divers arts traditionnels : cuisine, laque, broderie, danse, musique… C’est ici que je dois assister, ce soir, à un concert.

Monsieur Samsanith Nithakhong brode en compagnie d’enfants français dans le jardin de la maison. C’est là qu’il nous accueille. Le voilà d’emblée fort critique à l’égard de la troupe du Ramayana : oui, dit-il, ils reçoivent quelques subventions de l’Etat et, profitent du prestige de l’enceinte du Palais royal pour faire du business… Il m’agace. Je le lui dit. Il se ferme. Nous nous verrons ce soir. Poursuivons…

Architecture coloniale
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Villa Santi
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Villa Desproges
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Rue Xieng Mouane
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Villa de la rue Xieng Mouane
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Villa de la rue Xieng Mouane
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Villa de la rue Xieng Mouane
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Villa de la rue Xieng Mouane
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Villa de la rue Xieng Mouane
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Villa de la rue Xieng Mouane
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Villa

Un peu plus bas, dans cette même ruelle, resplendit l’ancienne maison du patrimoine, la Villa Xieng Mouane, vaste et belle demeure en bois qui repose sur de robustes et massifs pilotis. Construite conformément aux canons de la tradition, elle s’aligne  dans le sens du flux du fleuve… Habitée, elle ne se visite pas. En bas de la ruelle, on remarque un temple, le Wat Xieng Mouane. En lieu et place des traditionnels naga ou autres animaux, deux statues en gardent l’entrée : elles représentent un dignitaire ou un guerrier chinois, on ne sait… Au pied des deux statues du Bouddha, des novices balaient, ainsi purifie-t-on l’espace. Ils s’affairent également auprès des multiples pots de ces belles fleurs à tige piquante (on ignore leur nom), alignées le long des allées du temple.

Escale chez « Joma », le temps de se désaltérer. On lit l’édition anglaise d’un journal lao du jour. Le Laos, y est-il écrit, souhaite édifier prochainement cinquante à soixante centrales hydro-électriques et devenir ainsi la source d’énergie d’une partie de l’Asie en exportant l’électricité vers la Thaïlande (c’est déjà le cas), le Cambodge, le Vietnam, la Chine…

Par ailleurs, écrit le quotidien, le gouvernement a fait construire une route dans l’une des provinces. De ce fait, des villages sont désormais reliés à des centres urbains et le sida a fait un bond chez les 15-25 ans. Le gouvernement, poursuit-il, a investi 38% du revenu dans les infrastructures et 16,6% dans l’éducation et la culture, l’information sanitaire.

Wat Xieng Mouane
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Précarité encore

A la sortie de ce café, le serveur de « Indochina Spirit », juché sur sa moto, me reconnaît et m’invite chez lui. En fait, une pièce de dimensions normales, assez sombre, nantie d’un grand lit dans lequel il dort en compagnie de deux autres garçons, serveurs comme lui, avec lesquels il partage cette couche. Accrochés aux cintres d’une penderie ouverte, pendent tee-shirts, chemises, pantalons… Comme Keo, ce jeune-homme, âgé de vingt-deux ans, gagne trente dollars par mois et paie dix dollars mensuels ce « logement », soit un tiers de son salaire… Dur métier d’être jeune au Laos !

Musique de chambre

En fin d’après-midi, un tuk-tuk pétarade vers la rue Xieng Mouane. Dans le jardin de la belle maison sur pilotis de monsieur Samsanith Nithakhong, dos à la rue, sous les arbres ornés de lanternes, les musiciens ont pris place et, seule la lueur des bougies les éclaire. C’est  « un orchestre de chambre » composé de onze interprètes, dont deux voix féminines, qui battent aussi des mains pour soutenir le rythme (deux violons saw, deux flûtes hui, une cithare  kim, un xylophone ranat, un tambour khong vong grave, une paire de cymbalettes et un tambour khong . Manquent un xylophone ranat au timbre grave et une cithare kim ; au complet, l’ensemble compte donc treize membres, dont deux maîtres et trois jeunes garçons, âgés respectivement de treize, quinze et vingt-et-un ans. Quatre des musiciens appartiennent à l’ethnie hmong. La composition de cet orchestre est éloquente quant à la transmission et à la diversité ethnique.

En ce qui concerne le programme de la soirée, on commence par vénérer maîtres et instruments, avant d’interpréter des pièces du répertoire classique, dit lao-deum, dont l’une d’influence chinoise (chinh sê), d’autres spécifiquement de Luang Prabang (« Lao damneun saï », par exemple). Un titre, emprunté au répertoire de la cour du Cambodge, conclut la première partie, la danse du démon (phra-lak phra-lam), la seconde. « Douang champa », l’illustre hymne à la fleur du frangipanier, figure également au programme, parmi quelques perles.

Au cours du dîner au « Café des Arts », on assiste à une bataille de chats… Les jours précédents, un gros criquet se promenait sur l’un des cadres, un lézard sur le mur… Une ménagerie en liberté ! On déguste, ensuite, au « Pack Luck Liquor », au sein d’un décor de bouteilles, un capiteux vin chilien, dans un joli verre, en écoutant la belle voix de Laura Fygi.

Orchestre de chambre à la Maison Phouang Champa
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Xylophone ranat
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Maître de Khong Vong grave
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Maître de Saw
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Joueur de kim
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Joueur de khong
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Voix et rythme
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MERCREDI 31 OCTOBRE

LUANG PRABANG

Temple

Il fait lourd. Je visite cependant le Wat Mai. Construit à la fin du XVIII° et au début du XIX° siècles et rénové en 1970, il est coiffé d’une toiture à cinq pans. « L’entrée, dit le guide, est précédée d’un portique à colonnades, et le plafond est orné de motifs dorés sur fond rouge tandis que ceux des piliers sont dorés sur fond noir. Chaque pilier a le sien : qui un singe, qui un lotus, qui des motifs floraux. Et une profusion de Bouddha de toutes tailles.

En façade, des bas-reliefs en ciment doré représentent des scènes de la vie rurale et de la vie quotidienne des Laotiens. On y voit les principaux animaux du pays : cerf, tigre, rhinocéros, éléphant. »

Sous un abri, on découvre une longue pirogue, plus loin, un local de conservation des manuscrits anciens, l’habitat des moines et des piles de livres, un grand puits.

Wat Mai
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Wat Mai
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Campagne

En début d’après-midi, sous un ciel gris et maussade, départ en moto, de fabrication chinoise, en compagnie de Keo, en direction de la cascade de Tad Kouang Si, située à trente kilomètres de la ville. C’est une superbe route de montagne qui sillonne la campagne ; les cimes embrumées, au pied desquelles les rizières déroulent leur tapis vert, composent la toile de fond. Des buffles noirs, armés de cornes effilées, paissent paisiblement ou bien… encombrent la route. La plupart des maisons qui forment les villages traversés offre une architecture traditionnelle : pilotis, murs de bambou et toits de chaume. A une dizaine de kilomètres de Luang Prabang, un village hmong rassemble des maisons tout en chaume. Comparés à la beauté de ceux de cette cité, les temples de village paraissent bien modestes. Les paysans sont pauvres et, leurs enfants vont dépenaillés. Des femmes portent de lourds paniers remplis de feuilles : litière, fourrage ou combustible ? La basse-cour s’égaye dans les cours et sur la route.

On traverse en divers endroits de hauts bois de teck. La végétation est luxuriante, mais la médiocrité de mes connaissances botaniques me dissuade de la décrire. Ici et là, de grands papayers se dressent chargés de leur couronne de fruits. En ce paysage grandiose, la nature est reine et l’air frais.

La pluie salue notre arrivée sur le parking voisin des chutes. Nous ne nagerons donc pas,  mais le paysage coupe le souffle ! D’abord, on aperçoit, derrière une clôture, des ours et l’on cherche les tigres d’Asie mais, ils se cachent… On découvre ensuite quelque trois étages de chutes, chacune formant une mare où des nageurs se baignent. La plus élevée, puissante et belle, réduit l’homme à sa petitesse. La balade sous les frondaisons, à la découverte des chutes, est un émerveillement. Fleurs et arbustes abondent. Nous rebroussons chemin en empruntant l’asphalte, bordé également d’une abondante végétation. Il pleut. La route du retour est humide et sombre. Il pleut de plus en plus. Arrêt au marché Phousy, un marché couvert, le plus important de la ville, qui s’apprête à fermer. Nous poursuivons en direction d’une librairie… Assises autour d’une table, à l’extérieur, deux femmes papotent et veillent sur un bébé qui explore la table. A proximité, deux enfants jouent… Il pleut à seau.

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Cascade de Tad Kouang Si
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Fondue

Une brève éclaircie donne le signal du départ vers un restaurant qui sert des fondues « à la manière thaïe, version lao » ! Un brasero brasillant est disposé dans le trou qui bée au centre de la table. Dessus est déposé une sorte de grill muni de rebords : graisse de porc en haut et bouillon au creux des rebords en bas. Un panier de légumes et d’herbes à cuire, deux œufs, de la viande et du poisson. Sans oublier les épices. L’ambiance est familiale. Keo est ravi de son idée et apaise sa faim… Un verre sur la terrasse du « Hi-Ve », bar branché en pleine préparation de … Halloween ! Et un dernier en solo au « Pack Luck Liquor ». J’y retrouve la propriétaire de Satri House, l’hôtel qui m’héberge. Elle m’offre un verre et me reconduit « à la maison ». L’an prochain, dit-elle, dix-huit nouvelles chambres verront le jour sur un terrain voisin qu’elle possède. Puis, elle ose :

«- Les locaux sont gens bruyants, il faut qu’ils quittent la ville.

– Mais, Luang Prabang deviendra une ville-musée !

 - Il n’y a pas le choix. »

Auparavant, un résident français m’avait mis en garde quant à la propension des Laos « à pleurer et à tendre la main : le gouvernement à l’égard des ONG, les étudiants vis-à-vis de ceux qu’ils appellent leurs « sponsors » étrangers… Certains utilisent cet argent pour acheter une moto, un portable… Mieux vaut payer directement la faculté, le propriétaire, etc. et exiger de recevoir le relevé des résultats scolaires. » A l’évidence, ce monsieur parle d’expérience.

 

JEUDI 1° NOVEMBRE

LUANG PRABANG – VIENTIANE

Potiers

Le temps est incertain. En début d’après-midi, on embarque à bord d’une longue pirogue à moteur pour aller visiter Bane Tiane, un village de potiers situé sur l’autre rive du Mékong, la rive droite. Environ soixante-dix familles y vivent du travail de la terre glaise. On y fabrique « des jarres en colombins, façonnées sur des tours manuels, dit le guide. Elles sont ensuite séchées au soleil et cuites dans de grands fours à bois. » Depuis peu, on y fabrique aussi des tuiles plates, que l’on utilise pour la restauration des temples de Luang Prabang.

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En ce jour pluvieux, rares sont les embarcations qui naviguent dans les eaux boueuses du fleuve. Il n’y a guère de touristes ; seul quelques Laos et des pêcheurs. Certains bateaux transportent du sable puisé sur les rives du fleuve et destiné à la construction. On dépasse le temple dit vietnamien et « le pied du Bouddha » qu’il recèle. On débarque au pied d’un escalier, dans la boue, sous pluie battante. En haut, à l’entrée du temple, un vieux moine laisse fuir le temps… On s’engage dans un chemin de terre qui nous conduit chez le premier potier. D’autres suivront. Assis à son tour, il travaille tantôt seul, tantôt assisté de sa femme : par exemple, quand il façonne une immense jarre, commandée par un hôtelier. A proximité, au fond d’un couffin coiffé d’une moustiquaire, bébé dort. Sur le tour voisin, un garçonnet de douze ans fabrique avec habileté de petits objets, tortues ou petits pots divers, qu’il propose pour 10 000 kip. Il en obtiendra 5000. Des objets de vannerie sont accrochés aux poutres de cet immense « atelier » sur le sol duquel sèche quantité de pots et jarres de toutes tailles… Plus loin, profondément creusé sous le sol, un gigantesque four crépite : il cuit les poteries.

Nous sommes en pleine campagne. Par un chemin creux, les enfants rentrent de l’école. Nombre de constructions sont faîtes de bois et de chaume ; certaines recourent au béton et à la tôle. A proximité d’une maison, paradent d’orgueilleux dindons…

Le village potiers de Bane Tiane
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Le village potiers de Bane Tiane
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Le village potiers de Bane Tiane
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Le village potiers de Bane Tiane
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Le village potiers de Bane Tiane
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Le village potiers de Bane Tiane
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Vers 16 heures, sous pluie battante, on regagne la pirogue. Au bord du fleuve, des femmes lavent du linge dans l’eau boueuse ; deux fillettes nues se baignent. Des potiers, poteries en mains, embarquent sur une autre pirogue. Il pleut encore et la grisaille nimbe d’un certain flou ce paysage de montagnes et d’eau. C’est une sorte de lavis chinois que dessine la mauvaise humeur du ciel et, ce décor grandiose n’est exempt ni de magie ni de beauté.

En fin d’après-midi, départ pour l’aéroport, en tuk-tuk, sous une pluie torrentielle. Annoncé à 19h50, le vol QV 104 de Lao Airlines s’empresse de décoller à 19h4O ! Et tant pis pour les retardataires ! Quarante minutes plus tard, il atterrit à Vientiane. Retour à l’hôtel et, nouvelle incursion au bord du Mékong, dont la rive est débarrassée des souillures de la foire.

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VENDREDI 2 NOVEMBRE

VIENTIANE

A l’heure du déjeuner, promenade à pied au bord du Mékong : la rive est sale et boueuse. Le paysage n’offre guère un relief comparable à celui qui environne ce fleuve à Luang Prabang. Je ne m’attarde pas et poursuit mon chemin en direction du centre culturel français. Là, on partage un curry avec un historien français, en tournée dans les centres culturels d’Asie du sud-est pour une série de conférences sur le thème : « Paul Doumer, gouverneur d’Indochine ». Cet homme d’Etat (1857-1932) fut gouverneur général de l’Indochine de 1896 à 1902 et, président de la République en 1931. Il sera assassiné à Paris.

En début d’après-midi, c’est l’heure du bilan avec le conseiller culturel de l’ambassade de France. Je souhaite inviter à Paris certains des artistes du molam : ils ont une âme et leur prestation est spectaculaire. La conversation se poursuit… Elle me permet de préciser les conclusions que je tire de ce séjour.

Bilan

- Il est agréable de vivre ici et difficile d’y travailler, surtout dans le domaine de la culture. Le régime a échoué dans les deux domaines où ses pairs excellent, l’éducation et la santé. La culture est celle du passé. Aujourd’hui, elle est minimale. La télévision thaïe colonise les consciences…

- On constate que les connaissances en anglais, en deuxième année de faculté, équivalent à celles de l’entrée en cinquième chez nous. Les professeurs de médecine qui viennent dispenser des cours se plaignent que leurs étudiants aient le niveau d’infirmier. Les ingénieurs d’EDF qui recrutent préfèrent engager des Philippins. Les examens montrent que les élèves du collège bilingue de Luang Prabang ont le pire niveau de toute cette région d’Asie, etc.

- C’est épuisant de devoir toujours accomplir tous les efforts pour se faire comprendre, quand les Laotiens n’en font aucun et succombent à une certaine indolence. Il n’existe pas ici de culture de l’effort ou du progrès. Les valeurs sont celles d’un certain hédonisme, un hédonisme mesuré. Une certaine sensualité… Rappelons- nous les commentaires de Gauguin au sujet des Polynésiens.

- Des membres du parti constituent peu à peu, dit-on, une certaine ploutocratie. Les choses changeront ainsi, au fil du temps. L’ancienne bourgeoisie, celle qui existait avant la victoire des communistes, en 1975, a fui en France.

- Les Hmongs (que l’on appelait autrefois les Méos), eux, ont massivement gagné les Etats-Unis. Réfugié là-bas, un général hmong, Vang Pao, âgé de plus de quatre-vingt ans, a été arrêté : il projetait de faire sauter des édifices publics à Vientiane !

- Cette tendance à tendre la main des Laos, dénoncée par certains résidents étrangers, est réelle mais, pour autant, il n’y a pas de gène de la mendicité.

- Par ailleurs, Luang Prabang, ville musée ? Effectivement, il n’y a guère le choix, me confirme-t-on.

- Enfin, les rapports avec la Chine semblent complexes. Un chercheur de l’IRASEC résume ainsi la politique du gouvernement lao : « courtiser sciemment les Chinois pour venir tempérer la prépondérance des Thaïs dans l’économie lao et contrebalancer la tutelle politique exercée traditionnellement par les Vietnamiens. » Les Laotiens, eux, manifestent, à l’occasion, une certaine hostilité à l’égard de la Chine ; ne dit-on pas au Laos : « quand les Chinois pissent dans le Mékong, c’est sur nous que ça coule » ?

- On prête volontiers, ici, aux autorités une réputation d’incompétence, d’ignorance et d’inconscience.

Méditer

On rentre à pied, on contemple une dernière fois le stupa noir et on visite le Vat Xieng Gneun. Un novice fume en haut d’un escalier, d’autres se douchent. Un moine confie qu’il s’apprête à regagner son monastère, situé à vingt kilomètres, en tuk-tuk. Ses journées, là-bas, dit-il, sont consacrées à la méditation. Ici, on prie Bouddha et on médite une minute… Au terme de la conversation, il me prédit un riche avenir… Ah bon !

Je m’achemine vers le Wat Mixay, temple voisin de l’hôtel, de style thaïlandais influencé par la Chine. A gauche de l’entrée, une école primaire est peuplée de nombreux enfants des deux sexes : tous portent l’uniforme. Ayant regagné mes pénates, je lis, dans « Le Rénovateur », un article intitulé : « Eucalyptus, nouvel espoir des agriculteurs ». Espoir ?

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