Grande Salle, 30 Janvier 2009

Théâtre Masqué Khon

Thaïlande

Troupe de Département des Beaux–Arts du Ministère de la Culture : vingt danseurs, six danseuses, huit musiciens et un narrateur

L’ENLÈVEMENT DE SITA ET LE COMBAT ROYAL.

Le Khon est « un opéra fabuleux » auquel concourent théâtre, musique, danse… Cet art de cour, jadis entretenu par les rois qui en appréciaient le raffinement, est fort ancien. Il existerait, dit-on, depuis deux mille six cent ans. Version thaïe du Ramayana indien, ce Ramakirti ou Ramakien conte les relations parfois animées des hommes et des dieux. Adaptation locale, il reflète croyances, valeurs et idéologie du peuple thaï.
Les aventures du prince Rama (Phra Ram en thaï), avatar du dieu Vishnu, et l’enlèvement de son épouse Sita composent l’un des épisodes les plus populaires de cette épopée. La représentation épurée, mais néanmoins spectaculaire, des combats, symboles aussi des affrontements qui opposent les hommes, suscite l’enchantement.
Au terme d’un long apprentissage, qui contribue aussi à modeler leur corps, les acteurs-danseurs, en scène, demeurent muets : ils ne parlent ni ne chantent. Le récit incombe à un narrateur situé au sein de l’orchestre. Ils s’expriment avec leur corps. Princes et dieux, ils portent des maquillages vifs et soutenus, démons et singes, des masques superbes et expressifs. Ceux-ci, confectionnés en papier mâché et peints de couleurs éclatantes, sont d’une grande beauté. Les costumes, cousus à même le corps, et les plissés chatoyants ainsi que les coiffures témoignent du raffinement et de la munificence de cet art ainsi que de la richesse de l’esthétique thaïe.
Empreinte de grâce, la gestuelle obéit à des codes précis. Elle compose un véritable langage des signes qui exprime toute une gamme d’actions, de qualités ou de sentiments : présenter, désigner, beauté, bravoure, amour, réserve, gaîté, colère, chagrin…
« La musique prolonge et démultiplie la force dramatique du récit », a-t-on écrit. L’orchestre traditionnel, le piphat, réunit hautbois, xylophones et percussions (gong, tambour et cymbalettes) et la voix du récitant.
Plaisir de l’esprit, plaisir des yeux, ce spectacle merveilleux est d’un accès aisé. Dans le sillage de l’opéra chinois, des danses et musiques de Bali, c’est une nouvelle invitation au voyage.

Jacques Erwan

A la Cité de la Musique, à Paris, le 31 janvier 2009.