Tefa

Samedi 6 juin 2009
Théâtre des Abbesses
TEFA
Madagascar

« La vie, sans les maux qui la rendent grave, est un hochet d’enfant »
Chateaubriand

Le chant de l’âme déchirée
À Madagascar, au sud de l’île, vit le peuple antonosy. Le chant sarandra est considéré comme le sommet de son art vocal. Il exprime l’espoir mais davantage encore, la souffrance et la nostalgie. Cris et pleurs mêlés, c’est un chant arraché au plus profond de l’être. Il appartient à « une esthétique de la douleur ». Il est aussi une mémoire et tisse un lien affectif entre les vivants et les morts. Divertissements et rituels, le sarandra est omniprésent dans la vie quotidienne. Il s’adresse surtout à Dieu et aux ancêtres lors des veillées funèbres. Son intensité émotionnelle évoque celle du blues ou du flamenco, ces chants des âmes déchirées. Il emprunte diverses formes : a cappella ou accompagné par un ou plusieurs instruments, en solo ou à deux ou trois voix qui se répondent.
Issue d’une famille de chanteurs, Tefa, l’une des figures de cet art vocal, met en musique histoires et chroniques antonosy et jeunes et adultes se pressent pour l’écouter à l’occasion des grandes cérémonies. Elle est généralement entourée de quatre voix de femmes et d’un luth tenu par un homme. Au cours des concerts, les femmes jouent d’un instrument, venu de la nuit des temps, et en voie de disparition, le xylophone sur jambes. Elles interprètent également un chant qui appartient au répertoire du rite de passage de la circoncision, ainsi que cette originale danse des parapluies, à petits pas et en basculant le corps de gauche à droite, comme si elles allaient tomber… L’expression d’une tradition singulière encore vivante mais, pour combien de temps ?

Jacques Erwan