Sylvie VARTAN

Emission de Philipe CALONI (France Musique), 10 octobre 1975

Fin bobineau, enregistré au Palais des Congrès : « … ça n’accroche pas »

Jacques Erwan, micro : « ça n’accroche pas », en effet. Malgré les trois millions de Francs investis par un jeune mécène de 24 ans, une radio périphérique et une marque d’eau minérale. Malgré le déploiement de moyens lourds : plus de 100 costumes, une quinzaine de danseurs, une demi-douzaine de décors et un chorégraphe « made in USA ». Malgré la pléthore des spots et les décibels d’une sono tonitruante.

Décidément, madame Vartan et ses 25 « chansons » ne passent guère la rampe et les 4000 invités de la « générale » se sont contentés d’applaudir poliment. Sans plus. Des invités pourtant triés sur le volet des signes extérieurs de richesse puisque les cartons portaient la mention : « tenue de soirée ». Un public de minets en parade, de Rastignac en herbe venus étrenner leur premier smoking. Jolis minois d’éphèbes du show-business ; jeunes filles plus ou moins fanées à l’âge ou Proust les voyait en fleurs. Potentats en mal de mondanités accompagnés de dames distinguées.

Devant le tout Paris -mais le tout Paris est bien peu de chose- Sylvie Vartan essaie deux heures et demie durant de ressusciter le passé et de faire la preuve de son talent. Un passé qui remonte à quatorze ans -celui de la vague yéyé- qu’elle évoque dans le langage haletant et creux des « copains » : « je suis très émue et très contente d’être venue ». Mais cela sonne faux et les banalités que des adolescents pouvaient tenter d’admettre dans la bouche d’une jeune fille de 18 ans sont insupportables aux adultes sur les lèvres d’une femme de plus de 30 ans.

De l’ouverture -un pot-pourri de ses succès- jusqu’au final de cette super revue, Sylvie Vartan reste fidèle à elle-même et prouve qu’elle n’est qu’un produit du show business, un produit non fini. Elle tire toute les ficelles du music-hall y compris les plus éculées : de la descente d’escaliers à la voiture roulant sur scène. Elle chante mal fadaises après fadaises des mélodies d’une pauvreté à faire pleurer un zoo et des paroles d’une extrême indigence.

Elle force sa voix, s’égosille, nasille ou parle mais ne sait ni respirer ni chanter. A défaut d’être une chanteuse de rock, Sylvie Vartan en tous cas excelle dans le rauque.

Elle ne répugne pas non plus de céder à la démagogie et fait applaudir une douzaine de faux agents de police parce que, dit-elle : « on ne les salue jamais », réussissant ainsi où, semble-t-il, monsieur le ministre de l’Intérieur avait échoué.

Madame Vartan est travailleuse, dit-on, une élève studieuse sans doute mais décidément peu douée. Peut-être comprendra-t-elle qu’il ne suffit pas de brandir l’étendard du show business et de regarder vers la ligne dorée des gros budgets pour compenser le manque de talent.

Magnéto disque : « Duo des chats » de Rossini, interprété par Victoria de los Angeles et Elisabeth Schwarzkopf.