SICILE

AVRIL 2011

Mezzo limone

CHARRETTES

A Gino Provenzano, homme courageux et rayonnant, estime et admiration.

« Une charrette est comme un poème, le plus original et suggestif qui soit. Il dit au sujet du peuple sicilien beaucoup plus que vingt livres… Il constitue un des documents les plus précieux pour qui veut comprendre profondément l’âme de la Sicile. »

René BAZIN, 1897

 

VENDREDI 15 AVRIL

L’aéroport de Palerme porte le nom des deux juges assassinés par la mafia : aéroport Falcone et Borsellino. Dans un des halls s’étale une grande affiche : « Museo da mafia e cosa nostra »… On croit rêver!

Il fait nuit et il pleut. La voiture longe la ville de Palerme sans y pénétrer et roule une heure environ en direction de Bagheria. La chambre d’hôte est située dans une ferme édifiée au milieu des plantations de citronniers, mezzo limone. Tenue par des femmes, l’exploitation cultive aussi oliviers et légumes. Vers vingt- trois heures, nous arrivons enfin au restaurant « Al Carretto ». Le chanteur Giovanni Di Salvo nous y attend. Il étudie la philosophie, Kant, dira-t-il. Melchiorre, un autre chanteur, nous y rejoint. Charcuteries et fromages, les amuse- gueule traditionnels, précèdent une délicieuse et copieuse pizza. Le vino nero, le vin rouge, sicilien titre quatorze degrés… La conversation est riche d’informations pour le visiteur profane : il s’initie à ces chants de défi, les canzuni a carrittera, chants des charretiers de Sicile. Ainsi découvre-t-il que le chanteur s’accorde sur le son émis par les roues de la charrette tandis qu’elle roule et ces abbaniate, cris que profèrent les marchands, qui manient la métaphore et l’hyperbole… Ensuite, on évoque les jeux : zuffa, la dispute, tocco, le jeu de mains…

« Etre charretier, a écrit Giovanni Di Salvo dans le livret du cd de I cantori di Bagheria, Canzuna a la carrittera (fontimusicali), a toujours représenté quelque chose de bien plus significatif et profond que le seul exercice d’un métier. Cela impliquait, hier comme aujourd’hui, le fait d’appartenir à une élite privilégiée, possédant une identité culturelle propre et bien définie. »

 

 
SAMEDI 16 AVRIL

Ciel bleu ! Vu de la salle du petit-déjeuner, au premier étage, le panorama est grandiose : baie de Palerme, chaîne de collines et de sommets… On visite l’atelier d’un peintre de charrettes, celui de la famille Ducato qui pratique cet art depuis 1895. Le père, retiré, et le fils, en activité, sont tous deux présents. L’oncle, lui aussi, décorait les charrettes. Les couleurs utilisées sont vives, les motifs variés : effigie de sainte Geneviève ou de padre Pio, personnage de Roland ou de Napoléon, entrée d’Hannibal à Rome… Le peintre puise dans son dossier d’images et de reproductions : il les décalque et les interprète à sa manière… Plusieurs charrettes sont rangées dans l’atelier, dont une miniature. Certaines sont seulement sculptées ; elles ne sont pas encore décorées par le peintre.

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La tradition veut que les charretiers chantent réunis autour d’une table garnie de charcuteries, de fromages et de vin… Nous entamons donc, ensuite, la tournée des magasins pour acheter les victuailles : tous les commerçants sont des amis de Melchiorre et consentent aimablement une ristourne. Devant la salomeria passe et s’arrête une charrette chargée de quelques sacs… Dans cette boutique, on achète, en guise d’entrée, olives, charcuterie et fromage. A la carnezzeria, chez Mauricio Zarcone, de la viande d’agneau, des saucisses et des tripes, plat traditionnel pascal. A la panificio Ragusa, antico forno a legna, on se procure ce pain, cuit dans un four à bois d’olivier ; les chalands se bousculent et, en quelques minutes, la fournée s’enlève : il ne reste plus un pain ! Enfin, à l’oenothéque, on goûte le vin qui repose dans de hautes cuves en inox. On choisit un Nero Pachino, vin du sud de l’île, « vers l’Afrique » me précise-t-on. Il titre quatorze degrés. Quinze litres suffiront pour les réjouissances. Quelques oranges de la production locale complèteront le menu. En chemin, on croise un « entrepreneur ». On me dira ensuite qu’il est « une face taillée », en faisant le geste du pouce sur la joue droite, c’est-à-dire un mafioso… On admire en passant la maison de Melchiorre, un ancien fondouk, semé de motifs décoratifs. Dans l’atelier, on s’attarde devant les éléments de parure de chevaux fabriqués par ses soins.

On prend, ensuite, la route de cette maison, édifiée au-dessus des vignes de chardonnay, qui accueille les agapes. On décharge les victuailles, puis on dresse la table et on prépare le barbecue… Chacun s’active tandis que les convives-chanteurs arrivent les uns après les autres. Le banquet en réunit près d’une vingtaine, tous issus de lignées de charretiers et héritiers de ce patrimoine de chant a capella. Initialement, il y avait les muletiers et les funnacu (fondouk), souvent tenus par une femme, où bêtes, hommes et marchandises faisaient étape. Au cours de la deuxième moitié du XIX° siècle sont apparus les charretiers… Aujourd’hui, l’activité économique a disparu, mais la tradition chantée non seulement se perpétue, mais elle se transmet. La tradition picturale également.

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Loin des stéréotypes accrochés à l’image de la Sicile pour flatter l’oreille des touristes, il existe, écrit l’ethnomusicologue Girolamo Garofalo (cd fontimusicali) « un vaste échantillon de formes et de répertoires authentiques, car étroitement liés aux occasions les plus diverses d’une vie sociale réelle, et qui composent l’univers ethno-musical sicilien des chants de travail aux sérénades, des chansons de cantastorie aux fanfares, des chants religieux aux berceuses. » Les chants des charretiers appartiennent à ce corpus de chants de travail et de divertissement entonnés, désormais, lors de rencontres conviviales.

Les poèmes chantés se composent de distiques, strophes de deux vers endécasyllabiques (onze pieds). Ces chants a la carrittera forment un répertoire monodique, interprété sur « une échelle dorique ». Ils évoquent l’amour, le cheval ou la beauté d’un paysage. Les mélismes de l’ornementation témoignent de l’originalité du chanteur, « comme une véritable signature », affirment les experts. A la fin de son chant, dans le dernier distique, l’interprète « appelle » (chiamata) celui qui va lui répondre. Ce répertoire est en majeure partie, anonyme :

«  Perde l’autore

Quando trova il cantore »

(On perd l’auteur quand on trouve le chanteur), me dit-on.

Chacun s’installe autour de la longue table pour déguster les mets : fromages, olives, pain, agneau et saucisses grillés, tripes d’agneau de lait et vin. La convivialité s’invite et, à 14 heures, les premiers chants sont lancés. «  Ces chants, selon l’heureuse expression de Pierre Vaiana, prêts à être rappelés a monde. » Les dix-sept chanteurs, issus de diverses familles et appartenant à trois générations, de quinze à soixante-quinze ans, se relaient, d’appels en appels, de canzuni en abbaniate, jusqu’à… dix-sept heures ! Parmi les invités figure Gino Provenzano, soixante-douze ans, dont vingt-cinq d’activité professionnelle aux Etats-Unis : «  à Detroit, j’étais ouvrier d’usine, le jour et, la nuit, pizzaiolo… » Un personnage ! Il y a là Gino donc, Mariano, soixante-quinze ans, Giuseppe, vingt-et-un ans, et son père Inazio, Andrea, quinze ans, Eugenio… Tous détenteurs d’un patrimoine méprisé et menacé. Certains chantent assis, d’autres se lèvent. Les voix sont belles et les timbres variés, les visages expressifs. Ainsi va le temps et, on ne se lasse guère !

Chanteurs-convives du banquet : au centre, Gino Provenzano
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Giuseppe Testa
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Melchiorre Di Salvo
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Gino Provenzano
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Giovanni Di Salvo
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Giuseppe Testa
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Monsieur Testa, père de Giuseppe
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Le soir, on dînera à « Al Carretto ». On visite, ensuite, la collection de charrettes, accumulée sous le restaurant et fermée au public, ce qu’il est permis de regretter. Des dizaines de charrettes, brancards en l’air, roues et arrière ouvragés, certaines ornées de sculptures, peintes d’images diverses ou de motifs géométriques. Les couleurs sont vives : rouge, vert, bleu… On admire également de nombreux ornements que l’on continue à fabriquer pour les défilés : hauts panaches colorés- ils coiffent la tête des chevaux- harnais multicolores, garnitures du poitrail… Pierre Vaiana  décrit (cd fonti musicali) une sfilata (défilé): … « des dizaines de charrettes bariolées, rutilantes, tirées par des chevaux empanachés de plumes où le rouge prédomine en signe de protection. »

Al Carretto, collection de charrettes
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Parures pour le harnachement des chevaux
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Parures pour le harnachement des chevaux
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Giovanni Di Salvo
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DIMANCHE 17 AVRIL

On part dans la matinée en direction des Monti Sicani en suivant une route de montagne. On s’arrête à Lercara Friddi, le village de Lucky Luciano et de la famille Sinatra, où l’on déguste un pantofola dans une pâtisserie. Soudain, retentissent les roulements d’un tambour. C’est la procession de la fête des Rameaux : un tambour, des vents et, de chaque côté de la rue, des hommes vêtus de bleu tenant des rameaux ; le Christ, drapé de rouge, va, à cheval sur un âne, puis, vient la foule des fidèles… On se dirige, ensuite, vers Prizzi. Du belvédère, on contemple les montagnes environnantes et le lac, situé en bas, dans la plaine : paysage sauvage et grandiose !

Rameaux à Lercara Friddi
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Belvédère de Prizzi, Pierre Vaiana
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Belvédère de Prizzi
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On reprend la route vers le bourg voisin de Palazzo Adriano, « le village » de mon précieux compagnon de voyage, Pierre Vaiana. La beauté des lieux égale la beauté du nom ! C’est un beau village de pierre où règne une parfaite harmonie architecturale : la plupart des maisons épouse la même hauteur et s’orne de balcons ouvragés. La majorité des rues est pavée et, une grande place offre une antique fontaine en son centre et deux églises qui se font face, l’une catholique, l’autre orthodoxe albanaise. Un décor idéal pour le film « Cinéma Paradiso » dont l’un des acteurs, Philippe Noiret, demeurait, dit-on, chez l’habitant.

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Le déjeuner, chez la cousine de mon compagnon de voyage, réunit la famille autour d’une table dressée pour ce jour de fête. Le repas est pantagruélique : flan aux épinards, pâtes accompagnées d’une sauce tomate maison, viande de porc, boulettes, saucisses grillées, courgettes farcies, pâtisseries… Le tout arrosé d’un vin rouge sicilien titrant quatorze degrés. Les conversations en dialecte sicilien vont bon train, se croisent et se mêlent ; les timbres aigus des femmes percent la rumeur ambiante… Au terme de ces agapes, une promenade digestive s’impose et, l’on assiste alors à une nouvelle procession des Rameaux : elle sort de l’église catholique… Le pope de l’église d’en face y participe. Œcuménisme ?

En fin d’après-midi, on s’achemine vers Corleone, le fief du chef mafioso Toto Rina. C’est un superbe village, en contrebas de la route, à proximité d’un piton rocheux. Au bord de la route, comme partout ou presque dans l’île, pourrissent des monceaux d’ordures ménagères qui défigurent le paysage. Il est l’heure de regagner notre domaine de citronniers…

Le soir, dîner chez Giovanni Di Salvo. Il a préparé des pâtes à la manière des charretiers, cuisinées à l’huile d’olive et avec de l’ail découpé en fines lamelles ; cassate en guise de dessert. Au cours de ce repas, on évoque la nécessité de créer une structure juridique qui facilite l’expression chantée, poétique et picturale, en Italie comme à l’étranger, et autorise l’attribution de subventions. Puis, on s’interroge sur l’absence des bacs des disquaires du cd enregistré par fontimusicali (le seul existant) ; même la boutique Sicilia a memoria de l’aéroport ne le vend pas ! « Il nous gronde », dira l’un des chanteurs. On imagine, enfin, le récital de Paris où il faudra privilégier le naturel : sur scène, une table recouverte d’une toile cirée et garnie de victuailles, cinq chaises et une lampe qui tombe du plafond… Une diapositive projette l’image de charrettes richement décorées. D’abord, on entend le son des roues de charrettes puis, des abbaniate… Enfin, on décide du choix des chanteurs invités ; il doit respecter les familles et mêler les générations. Au terme de quelques palabres, la liste est établie : Giuseppe Testa, vingt-et-un ans, Giovanni Di Salvo, vingt-huit ans, Eugenio Donato, trente -et- un- ans, Melchiorre Di Salvo, quarante-huit ans, et Gino Provenzano, soixante-douze ans, trois générations !

Finalement, tous les cinq offriront deux récitals à Paris : l’un, au Théâtre de la Ville-Théâtre des Abbesses, l’autre, le lendemain, à la Maison des Cultures du Monde, tous deux couronnés de succès. Malheureusement, Gino Provenzano, pour lequel je concevais admiration, estime et affection, nous quittait peu après pour le paradis des charretiers. Je garde le souvenir précieux de notre rencontre au milieu des vignes et la mémoire de sa belle voix, en Sicile et lors des deux concerts parisiens.

Le départ, le lundi I8 avril, est matinal : ainsi évitera-t-on peut-être les embouteillages à la hauteur de Palerme…

I cantori di Bagheria à Paris
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Gino Provenzano et Jacques Erwan.
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I cantori di Bagheria à la Maison des Cultures du Monde
03
I cantori di Bagheria à la Maison des Cultures du Monde
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I cantori di Bagheria à la Maison des Cultures du Monde
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I cantori di Bagheria au Théâtre des Abbesses
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I cantori di Bagheria au Théâtre des Abbesses
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I cantori di Bagheria au Théâtre des Abbesses
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I cantori di Bagheria au Théâtre des Abbesses
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Voir l’article dans le programme du Théâtre de la Ville